Macron à La Sorbonne : La recherche célébrée, après avoir été sacrifiée

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Macron à La Sorbonne : La recherche célébrée, après avoir été sacrifiée


Lundi 5 mai au matin, Emmanuel Macron organisait une conférence dans le grand amphithéâtre de La Sorbonne, aux côtés d’Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne. L’objectif officiel ? Lancer Choose Europe for Science, une initiative censée attirer en Europe des chercheurs internationaux, et notamment américains menacés par la politique de Trump.

Mais cette opération séduction, dotée de 100 millions d’euros, sonne creux. À tel point que la présence présidentielle n’a été annoncée aux étudiants et personnels que le jour même, comme pour éviter toute mobilisation dans le Quartier latin. 

Une mise en scène soigneusement orchestrée, et culottée, venant de celui qui ne cesse de sabrer la recherche publique en France et d’un modèle européen fondé sur la compétition permanente des universités et des chercheurs, une hypocrisie rappelée justement sur X par Camille Mongin, secrétaire nationale de l’Union des Étudiant·e·s communistes.

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Compétition, précarité, désengagement : le vrai programme européen pour la recherche

Difficile, effectivement, de ne pas voir dans cette annonce une ironie mordante. Car ceux qui, à La Sorbonne, prétendent défendre la recherche européenne sont les mêmes qui l’ont méthodiquement fragilisée depuis des années. En France, Emmanuel Macron a imposé, par 49.3, un budget amputant 1,5 milliard d’euros à l’enseignement supérieur et à la recherche en février. Une coupe brutale, au moment même où il prétend « faire de la recherche une priorité ».

À l’échelle européenne, cette hypocrisie n’est pas nouvelle. Depuis le processus de Bologne (1999), l’université est soumise à des logiques néolibérales assumées : mise en concurrence des établissements, appels à projets chronophages, financiarisation croissante. Le modèle promu par l’Union européenne, à travers des dispositifs comme Horizon Europe et l’ERC, transforme les chercheurs en gestionnaires de dossiers, en quête perpétuelle de financement.

En France, cette politique a débouché sur la loi LRU (2007) entérinant l’« autonomie » des universités, un mot-valise qui masque le désengagement de l’État et la précarisation généralisée des personnels. Les jeunes chercheurs cumulent les CDD, les projets s’enchaînent sans perspectives stables, et les collectifs de travail sont disloqués. Cette logique de compétition permanente affaiblit l’indépendance scientifique et l’égalité d’accès au savoir.

Pendant ce temps, les conditions d’étude n’arrêtent pas de se dégrader : plus d’un étudiant sur quatre travaille pour financer sa formation, les résidences universitaires n’accueillent que 30 % des boursiers (deux fois moins sur Paris) tandis que des millions de mètres carrés de bureaux restent vides sur l’ensemble du territoire.

Choose Europe for Hypocrisy

L’initiative Choose Europe for Science n’est qu’un bel emballage. Elle prétend accueillir les chercheurs étrangers menacés, alors que la recherche française et européenne sont elles-même à l’agonie. La question n’est pas seulement celle de l’accueil, mais de la capacité à garantir des conditions dignes pour tous ceux qui font vivre la science, ici et maintenant.Faire de la science une priorité ne se proclame pas dans une conférence à La Sorbonne, ni en 280 caractères sur X. Cela se démontre par les moyens concrets que l’on y consacre : des financements stables, des statuts dignes et protecteurs, des politiques fondées sur la coopération plutôt que sur la compétition.


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