Jaurès, le socialisme et la révolution en 5 citations 

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Jaurès, le socialisme et la révolution en 5 citations 

En 1902, Jaurès participe à la fondation du Parti socialiste français. En 1905, à celle de la Section française de l’internationale ouvrière, qui deviendra Section française de l’internationale communiste en 1920. Père fondateur d’une authentique dimension française du socialisme, le député du Tarn s’appliqua toute sa vie à unir la gauche hexagonale, des anciens communards aux sociaux-démocrates, autour d’un projet de société commun. 

Cinq citations de Jean Jaurès sur le socialisme.

L’histoire enseigne aux hommes la difficulté des grandes tâches et la lenteur des accomplissements, mais elle justifie l’invincible espoir.

Extraite de son “Discours à la jeunesse” prononcé au lycée d’Albi, où il enseigna, le 30 juillet 1903, cette citation de Jaurès exprime son attachement au matérialisme historique. Le dirigeant socialiste est directement influencé par les théories de Karl Marx et de Friedrich Engels. 

Au cours de ce même discours, Jaurès lance à la foule : “Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire”, véritable appel à la compréhension et au dépassement des conditions matérielles (les rapports de production) qui sous-tendent les apparences superficielles de la société. 

Pour Jaurès, l’évolution de l’Histoire est “lente” et “difficile” puisqu’elle nécessite de profonds changements dans les infrastructures économiques et les rapports de production. Pourtant, elle “justifie l’invincible espoir” car l’avènement du socialisme est inéluctable. La classe dominante est amenée à s’effondrer sous le poids de ses propres contradictions, au même titre que la bourgeoisie a pu jadis triompher de la noblesse. “« Il y aura toujours des pauvres et des riches » disent-ils, comme on disait il y a quelques siècles « Il y aura toujours des nobles et des roturiers », comme Aristote disait il y a plus de deux mille ans « Il est dans la nature humaine qu’il y ait des esclaves ».” écrivait déjà Jaurès en 1897 dans sa préface à l’“Enquête sur la question sociale en Europe” de Jules Huret.

La Révolution française a préparé indirectement l’avènement du prolétariat. Elle a réalisé les deux conditions essentielles du socialisme, la démocratie et le capitalisme. Mais elle a été, en son fond, l’avènement politique de la classe bourgeoise.

Jaurès est historien de la Révolution française. Cette citation est tirée du premier volume (La Constituante) de son Histoire socialiste de la Révolution française parue en 1908. Pour lui, 1789 se caractérise par le renversement politique de l’ordre féodal par l’ordre bourgeois, capitaliste et libéral, là où c’est davantage l’industrialisation qui a bousculé les rapports de force économiques et sociaux. 

Pourtant, il ne s’agit pas de jeter à la poubelle ce renversement, loin de là. La bourgeoisie doit dans un premier temps triompher de l’Ancien Régime pour que la classe travailleuse puisse, à terme, triompher du capital. Sans compter sur la multiplicité des acteurs ayant pris part à la Révolution, parmi lesquels certains qui préfiguraient déjà beaucoup d’aspirations socialisantes, comme Babeuf, “premier communiste” pour Marx, qui chercha à supprimer la propriété particulière avec son “Manifeste des Plébéiens”.

Parce que le milliardaire n’a pas récolté sans peine, il s’imagine qu’il a semé.

Cette citation provient de l’un des grands discours de Jaurès devant la Chambre des députés daté du 19 juin 1902. 

Le bourgeois, et même en l’occurrence le très grand bourgeois, pense souvent que sa fortune est le fruit de son effort, de son mérite, mais elle ne repose en réalité que sur le vol du travail de ses salariés, sur l’accaparement de la plus-value, donc de la valeur supplémentaire produite par les travailleurs au-delà de ce qui leur est payé en tant que salaire.

Les forces du travail, c’est-à-dire les forces de production, doivent cesser d’être exploitées par des intérêts privés, pour devenir des forces sociales.

Tirée de son discours “Les Questions sociales et les socialistes” prononcé le 28 janvier 1900 à l’occasion du Congrès du Parti Socialiste, cette citation illustre la volonté de Jaurès de dépasser dialectiquement la société de classe, et ce, en passant par la socialisation des moyens de production. 

La propriété privée permet au capital de maximiser ses profits, impliquant la sous-rémunération des travailleurs, en leur accordant des rétributions bien moindres que la valeur qu’ils produisent. Le dirigeant socialiste en appelle à la gestion collective des moyens de production, afin qu’ils puissent être mis au service de tous plutôt qu’à celui des intérêts privés. 

Il ne peut y avoir de révolution que là où il y a conscience.

Cette citation de Jean Jaurès est extraite de son discours intitulé “les Réformes sociales et la Révolution” prononcé à la Chambre des députés le 28 juin 1904. 

Pour lui, le dépassement du système capitaliste est fondamentalement révolutionnaire. Mais le renversement de la classe dominante nécessite un certain niveau de conscientisation du prolétariat. Tel que conçu par Marx, le prolétariat doit prendre conscience de la place qu’il occupe au sein des rapports de production, pour qu’il puisse passer d’une classe “en soi” à une classe “pour soi”, qu’il s’organise en parti et en syndicat. 

Pour Jaurès, la France est une Nation inexorablement révolutionnaire. Sa pensée peut se traduire en une forme de synthèse faite entre marxisme et jacobinisme, un socialisme à la française. Mais nul ne devrait pouvoir dépeindre le dirigeant socialiste, comme a essayé de le faire la République bourgeoise en l’héroïsant, en social-démocrate mou, quasiment centriste et consensuel. Jaurès est révolutionnaire. 

Le lancement de sa vie politique se fait à Carmaux, en 1892, alors qu’il était venu soutenir la grande grève des mineurs, peu avant d’avoir entamé un grand travail de réhabilitation de la Commune de Paris dont il dira au début du XXe siècle qu’elle “fut dans son essence, dans son fond la première grande bataille rangée du Travail contre le Capital. Et c’est même parce qu’elle fut cela avant tout […] qu’elle fut vaincue et que, vaincue, elle fut égorgée.


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