Né à Lyon en 1886 dans une famille juive, Marc Bloch est passionné d’histoire, comme l’était son père. Reçu à l’agrégation en 1908, M. Bloch est passionné par le Moyen-Age.
En 1914, il est mobilisé lors de la Première Guerre mondiale. En 1919, il reprend son métier d’enseignant et de chercheur. Dès 1919, il part en Alsace, nommé à l’université de Strasbourg redevenue française après 47 ans d’occupation allemande. Ce n’est pas l’effet du hasard. Avant 1914, Marc Bloch avait séjourné dans plusieurs universités allemandes et maîtrisait parfaitement la langue germanique ; cela était nécessaire pour enseigner à Strasbourg, car beaucoup d’étudiants ne connaissaient qu’approximativement le français qui y avait été proscrit.
Pendant 15 ans, Marc Bloch se fait remarquer par ses études sur le Moyen-Age, et en particulier par son ouvrage consacré aux rois thaumaturges susceptibles d’accomplir des miracles ! Dans les années trente, avec d’autres historiens, il créera la revue Les Annales bientôt connue dans l’Europe entière. En 1936 il enseigne à la Sorbonne. Dans ce quartier latin profondément marqué par les organisations fascistes et antisémites, puissantes dans le monde étudiant, le juif Bloch est en proie à de multiples attaques.
En 1939, malgré ses 53 ans, une polyarthrite et une famille nombreuse, il se porte volontaire dès la déclaration de guerre. Tout comme durant la Première Guerre mondiale, il est signalé pour son courage, son sens de l’organisation et du commandement.
Pétain et le gouvernement de collaboration étant arrivé au pouvoir, il est frappé par les décrets anti-juifs du 3 octobre 1940, il n’a plus le droit d’enseigner. Pourtant, un an plus tard, le ministre de l’instruction public Jacques Chevalier, dont le fils avait été un de ses élèves, lui accorde l’autorisation exceptionnelle d’enseigner. Entre temps, réfugié dans la Creuse, Marc Bloch rédige « Une étrange défaite », c’est le regard acéré et intelligent d’un historien sur la bataille de France et la défaite de l’armée française qu’il a vécu. Cet ouvrage, interdit pendant l’occupation, sera publié en 1946 ; sa bibliothèque restée à Paris est pillée par l’occupant. En 1941, Marc Bloch, quoique se sentant menacé, refuse un sauf-conduit pour les États-Unis. Nommé fin 1941 à Montpellier, il est poursuivi par la vindicte du président de l’université pétainiste et antisémite Augustin Fliche. Alors que toute la France est occupée, il part pour Lyon. Dans cette métropole dont le chef de la Gestapo est Klaus Barbie, il participe au M.U.R. Repéré, il est arrêté le 8 mars 1944 et subit de multiples tortures.
Le 16 juin, il est assassiné par des coups de feu tirés dans son dos. Certains attribuent cet acte à la gestapo. L’historien Pascal Blanchard, co-directeur de l’I.H.M de Lausanne, a étudié les circonstances de cet assassinat. Il remarque qu’il n’a pas été accompli dans un lieu habituellement contrôlé par l’occupant. Selon lui, cet acte est sans doute le fait de la milice. Ce groupe d’assassins était formé de Français partisans de Pétain et de Hitler ; certains de ses survivants se retrouveront aux côtés de Jean-Marie Le Pen en 1970 pour former le Front national, devenu aujourd’hui Rassemblement national.
Ce grand intellectuel mérite le Panthéon. L’annonce a été faite le 23 novembre, 80ième anniversaire de la Libération de Strasbourg. Espérons que cette annonce ne masque pas quelques calculs politiciens. Regrettons enfin qu’une fois encore des femmes dirigeantes communistes comme Martha Desrumeaux, Marie Claude Vaillant Couturier, Danielle Casanova, ne soient pas encore honorées.