Grenelle sur les violences conjugales : le beurre sans l’argent du beurre

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Grenelle sur les violences conjugales : le beurre sans l’argent du beurre

En juillet 2019, le Premier Ministre annonçait qu’un grenelle des violences conjugales auraient lieu en septembre. Cette décision fait suite aux nombreuses mobilisations qui ont eu lieu ces dernières années contre les violences faites aux femmes. Depuis le début de l’année, le collectif Nous Toutes a mis en place un compteur des féminicides pour que les français prennent conscience de l’ampleur du phénomène. Il y a quelques jours, le grenelle se terminait avec l’annonce d’une quarantaine de mesures pour lutter contre les violences faites aux femmes. 

Les principales mesures annoncées par le gouvernement : 

Le 25 novembre, date de clôture du grenelle, Marlène Schiappa et Edouard Philippe ont annoncé les mesures phares proposées par les différents groupe de travail. 

Concernant l’accueil des femmes dans les commissariats, une grille d’évaluation du danger de 23 questions va être mise à disposition dans les commissariats pour aider les policiers dans leur travail et 80 postes supplémentaires d’intervenants sociaux vont être créés d’ici 2020 dans les commissariats et les gendarmeries. 

Pour mettre à l’abri les femmes victimes de violences, plusieurs mesures ont été annoncées, notamment la création de 1000 places en hébergement d’urgence et le 3119 sera désormais fonctionnel tous les jours, 24h/24.  

Sur le plan législatif, de nombreuses lois vont être révisées pour mettre fin « aux absurdités juridiques ». Les enfants de père reconnus comme conjoint ou ex-conjoint violent ne seront plus obligés de subvenir aux besoins de leur père, la notion « d’emprise » sera intégrée au droit pénal et l’exercice de l’autorité parentale du père violent pourra être suspendu. 

Des mesures largement critiquées par les associations féministes :

Les mesures annoncées par le gouvernement à la suite du Grenelle contre les violences conjugales ne sont pas à la hauteur d’ambitions au regard de la situation qui ne fait qu’empirer puisque le nombre de féminicides est en forte hausse par rapport à l’année précédente. Même si elles vont pour une partie dans le bon sens, elle laisse les associations féministes sur leur faim. 

La mise en place de ces nouvelles mesures nécessite un budget important. Depuis de nombreuses années, les travailleurs sociaux et les associations qui prennent en charge les femmes victimes de violences alertent le gouvernement, car les mesures et les dispositifs déjà existants ont du mal à fonctionner à cause du budget trop faible. À la suite du Grenelle, Marlène Schiappa et Édouard Philippe annoncent des mesures tout en arguant que des moyens sont disponibles alors que le budget insuffisant de l’année dernière a été reconduit. Mettre en place des mesures législatives sans moyens pour les appliquer derrière ne permettra pas de lutter efficacement contre les violences faites aux femmes.

Une grande partie de la bataille contre les violences faites aux femmes passera inévitablement par la prévention. Même si quelques mesures vont dans ce sens-là, elles ne sont pas suffisantes et restent floues. Concernant la formation des enseignants, par exemple, c’est une mesure qui est déjà existante, mais qui n’est pas suffisante puisqu’elle ne permet pas aux enseignants de sensibiliser les élèves sur cette question. Les mesures sur la prévention dans les écoles ne précisent pas de quelle nature sera la prévention et quels moyens seront mis en place pour permettre qu’elle ait lieu.

L’amélioration de l’accueil dans les commissariats des femmes victimes de violences se fera en incluant dans la formation initiale des policiers et des gendarmes une réelle sensibilisation sur cette question et en mettant à disposition dans les commissariats et les gendarmeries des professionnels qualifiés pour aider les victimes. Pour l’instant, il n’est question de former que 80 intervenants sociaux pour toute la France, ce qui ne serait même pas suffisant pour la région francilienne. 

Le nombre de féminicides en France est un problème de société qui nécessite des politiques publiques à la hauteur, comme en Espagne où le nombre de féminicides a chuté ces dernières années. En France, les associations continuent à assumer la majeure partie du travail avec un budget insuffisant. Il est temps que l’État prenne ses responsabilités et qu’ils mettent à disposition le milliard pour lutter efficacement contre les violences conjugales. 


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