Donald Trump a conclu un accord bilatéral avec les Houthis qui a singulièrement agacé Tel-Aviv. Face aux pertes commerciales qu’implique l’insécurité en mer Rouge et au coût exorbitant d’un mois de bombardement du Yémen, la Maison-Blanche a estimé que le coût du soutien inconditionnel à Israël était supérieur au bénéfice retiré. S’agit-il d’un accroc momentané ou d’un effritement du soutien américain à l’État hébreu ?
Un enjeu à plusieurs milliards
Les Houthis contrôlent une portion stratégique du territoire yéménite, ce qui rend leur capacité de nuisance économique totalement disproportionnée par rapport à leurs moyens militaires. Depuis 2023, les Houthis harcèlent la marine marchande, singulièrement américaine et israélienne, qui passe le détroit de Bab El-Mandeb en direction du canal de Suez. Cette route représente 10 % du commerce mondial.
La piraterie houthie a fait passer la fréquentation du canal de 26 000 navires en 2022/2023 à 20 000 en 2023/2024. Le manque à gagner dépasse les 2 milliards de dollars pour la société du canal de Suez. Donnant directement sur la mer Rouge, le port israélien d’Eilat accuse une diminution de 80 % de ses revenus en 2024.
Une débâcle militaire américaine
Donald Trump avait promis de mettre un terme à cette situation. La marine états-unienne a donc lancé une vaste opération, censée durer 8 à 10 mois, comprenant bombardements du Yémen et assassinats ciblés.
Après un mois d’opération, le bilan est catastrophique. Les 1 000 frappes américaines en territoire yéménite viennent certes s’ajouter au terrible bilan guerrier de la Maison-Blanche, mais c’est bien le coût financier qui inquiète le président des États-Unis. Au moins six drones MQ-9 Reaper ont été abattus, à 28 millions de dollars l’unité, auxquels s’ajoutent deux avions F-18 à 120 millions de dollars l’unité, accidentellement coulés en mer Rouge. Au total, ce mois de déploiement est chiffré à un milliard de dollars, pour de piètres résultats.
Un accord bilatéral sans les Israéliens qui rebat les cartes dans la région
Donald Trump a donc tourné casaque. Finie la solution militaire, place à un deal bilatéral. La marine marchande battant pavillon états-unien ne sera plus inquiétée, en échange de la fin des bombardements sur le Yémen aux mains des Houthis. Aucune garantie n’est en revanche apportée concernant les navires israéliens.
Quelques jours après le tir d’une roquette houthie contre l’aéroport de Tel-Aviv, et alors que l’armée israélienne bombarde le Yémen, cet accord bilatéral a profondément agacé le gouvernement Netanyahu. Surtout, il inquiète le gouvernement israélien, qui prend conscience que, si soutenir sa politique devient trop coûteux, il pourrait également être lâché par les États-Unis sur le sujet fondamental du nucléaire iranien, où des désaccords émergent déjà.