Barnier prend le chemin de la casse sociale  

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Barnier prend le chemin de la casse sociale  

Mardi 1 octobre, le Premier ministre Michel Barnier prononçait son discours de politique générale devant les députés. Face à une Assemblée nationale fragmentée, le chef du gouvernement s’est contenté de survoler des sujets, certainement dans l’objectif de ne froisser aucun de ses alliés tant sa survie ne tient qu’à un fil. 

Derrière ses grandes formules générales, le Premier ministre a fixé un cap clair et cohérent : guerre aux services publics, pas touche au capital. Décryptage. 

La cure d’austérité aura bien lieu 

Le Premier ministre a dans un premier temps fait mine de se démarquer de l’ex-ministre de l’Économie Bruno Le Maire en assumant que l’objectif de réduction du déficit à 3% du PIB ne serait pas tenu pour 2027. Mais pour mieux annoncer une réduction des dépenses publiques, certes plus étalées dans le temps que prévu, mais bien réelles. Car en voulant ramener le déficit à 5% du PIB d’ici à 2025, le gouvernement devra aller chercher au moins 35 milliards d’euros dans son budget. 

Et le Premier ministre a été clair : la plus grande partie des efforts reposera sur les services publics, qui se verront amputer d’au moins 20 milliards d’euros. Si le détail de ces réductions sera connu d’ici à quelques jours, il est évident que cela se fera au détriment des services rendus à la population. 

Un “effort” demandé aux plus riches 

Toujours dans sa volonté de mettre en scène une forme de rupture avec la précédente majorité, Michel Barnier a indiqué vouloir faire porter une partie de la réduction du déficit sur les épaules des grandes entreprises et des plus riches. 

Mais les précautions dans le vocabulaire témoignent d’une ambition extrêmement réduite. Pas question en effet de parler d’une hausse d’impôts pour les plus riches, de taxation du capital ou de suppression des cadeaux fiscaux faits ces dernières années. Michel Barnier a ainsi demandé, presque en s’excusant, un “effort ciblé, limité dans le temps” aux grandes entreprises qui réalisent les plus grands profits et aux particuliers les plus aisés. Pas grand-chose, donc, mais assez pour faire hurler le camp présidentiel, qui semble tressaillir à l’idée de taxer les profits de leurs amis du grand patronat. 

Pourtant, au-delà de la faiblesse de cet “effort” (deux fois moins fort que celui demandé aux services publics), on peut se questionner sur l’intérêt d’une telle mesure. En effet, il ne s’agit pas de mettre à contribution le capital pour mener une politique de développement, mais de mettre en œuvre des taxes exceptionnelles pour amortir légèrement la cure d’austérité imposée au plus grand nombre. 

Une fausse augmentation du SMIC 

Sur le SMIC, la mise en scène du changement tourne à l’imposture. En annonçant une hausse du salaire minimum au 1ᵉʳ novembre, le Premier ministre ne fait qu’avancer de deux mois la hausse annuelle prévue au 1ᵉʳ janvier. Une arnaque d’autant plus visible que cette augmentation de 2% rattrape à peine l’inflation prévue à 1,9%. Pas une hausse, donc mais tout juste un rattrapage, qui aurait eu lieu, avec ou sans le Premier ministre. 

Les syndicats ne s’y sont d’ailleurs pas trompés. Dans un communiqué publié dans la foulée du discours, la CGT a revendiqué “une nouvelle augmentation du Smic en janvier et qu’elle soit suivie d’une augmentation du point d’indice dans la fonction publique et de l’augmentation de l’ensemble des salaires”.

Éducation nationale : une “priorité” sans moyens 

Passage obligatoire d’un discours de politique général, Michel Barnier a affirmé son attachement à l’Éducation nationale en voulant en faire une “priorité” de son action. Et puis… c’est tout. 

Aucune annonces concrètes n’ont été faites alors que syndicats, élèves et parents d’élèves alertent depuis des mois sur une école au bord du gouffre. Il faut dire qu’avec le budget d’austérité qu’il prépare, la perspective de recrutement massif de professeurs ou de suppression de Parcoursup apparait lointaine. 

La volonté de faire appel aux professeurs retraités plutôt que d’ouvrir de nouvelles places au concours confirme bien que cette grande “priorité” risque de se faire sans aucuns moyens supplémentaires.  

Le “dialogue social” pour se défausser des sujets chauds ? 

Vantant une nouvelle méthode fondée sur le dialogue, Michel Barnier a renvoyé aux syndicats et au patronat certains dossiers. Il en est ainsi de la réforme de l’assurance chômage qui semble de plus en plus enterrée, mais aussi de la réforme des retraites. 

Il s’agit pour le Premier ministre de “corriger” des “limites” de la réforme imposée de manière brutale en 2023 par Emmanuel Macron. Pas question, donc, de l’abroger, malgré une volonté de l’immense majorité du pays. Là aussi, le “en même temps” de Michel Barnier fonctionne à plein régime : “en même temps”, les partenaires sociaux peuvent négocier la réforme, “en même temps”, il n’est pas question de revenir sur ses fondamentaux, à savoir l’augmentation de la durée légale de départ.


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