Marlène Schiappa s’est illustrée une fois de plus dans sa méconnaissance des problématiques féministes avec des paroles qui ont fait bondir les gynécologues et les obstétricien.ne.s de France, les accusant de maltraiter leurs patientes.
Une remise en contexte et une analyse des violences faites aux femmes dans le milieu médical semble alors important, afin de nuancer les propos de la Secrétaire d’Etat aux Droits des Femmes, mais aussi pour mettre le doigt sur un problème récurrent, illustré par de nombreux témoignages.
L’hôpital patriarcal
A l’image de notre société, le milieu médical et hospitalier est le théâtre des dommages du capitalisme. Face à un besoin libéral de rendement, de productivité, mais aussi à un manque cruel de personnel, les patient.e.s comme les employé.e.s subissent des situations parfois intolérables. De moins en moins nombreux, condamné à faire toujours plus d’heures, le personnel médical voit le nombre de burn out et de dépressions se multiplier, au détriment de la bonne prise en charge des patient.e.s.
De plus, le gouvernement En Marche semble reculer sur les questions de santé : menace sur la Sécurité Sociale avec l’annulation des cotisations salariales sur l’assurance maladie, mais aussi sur la fonction publique avec la suppression de plus de 120 000 postes promis par notre Premier Ministre, Edouard Philippe.
On notera également que les informations sur le programme concernant notre santé du mouvement d’Emmanuel Macron sont classées sur le site dans la rubrique “Modernité économique”, ce qui peut interroger sur les véritables objectifs de notre président.
La médecine dans le cadre de l’économie libérale
Cette libéralisation du monde de la santé est démontrable à travers l’exemple de la médecine dite féminine, à savoir l’obstétrique et la gynécologie, où le capitalisme est renforcé par le patriarcat. Protocoles intrusifs, violences, mépris et déshumanisation semblent en effet sévir dans un milieu qui nécessite pourtant écoute, communication et confiance.
La première conséquence n’est pas des moindres : la notion primordiale de consentement ne semble pas être respectée, si l’on en croit bon nombre de témoignages de la patientèle. Ainsi, est-ce acceptable de laisser des enseignant.e.s et des étudiant.e.s pratiquer des touchers vaginaux et/ou rectaux sur des patientes sous anesthésie générale ?
Cette question est légitime dans la mesure où le monde médical manque de communication sur les gestes effectués, leur but et leur utilité. C’est le cas, par exemple, de l’épisiotomie, consistant à pratiquer une incision sur la paroi vaginale et le muscle du périnée afin de “faciliter” l’accouchement. Réalisée dans 30% des cas, cette intervention n’est en réalité nécessaire que pour 9% des accouchements, et engendre des complications parfois graves (déchirements vaginaux, infections, séquelles respiratoires sur l’enfant…).
Pourquoi un tel acte, s’il est inutile, voire dangereux pour la mère et le bébé ? C’est une raison économique qu’il faut avancer : les sages-femmes et les gynécologues sont soumi.se.s à une nécessité de productivité, les forçant à utiliser des pratiques visant à accélérer les accouchements, privant certaines femmes d’un moment physiologique très important, ou en mutilant d’autres. Les mères sont alors réduites à leurs capacité matrice, et la pratique du chantage moral devient fréquente : si l’enfant et la mère sont en vie, la plainte pour blessure physique et psychologique devient illégitime.
Un milieu médical déshumanisé
Notre façon de vivre prône une médicalisation de tout acte physiologique à outrance, ne laissant pas place au libre arbitre de la patientèle, et à sa connaissance des interventions médicales. C’est bien le cas dans le milieu que nous évoquons ici. Les témoignages se multiplient, sans appel : les actes subis par ces femmes (lors de l’accouchement, d’une consultation gynécologique ou autre) visaient avant tout à faciliter le travail du personnel soignant, lui-même soumis à un stress important.
Cette situation ne prend jamais en compte la volonté, les besoins, voire l’état de santé des patientes. Le ressenti émotionnel rapporté dans ces témoignages est fort, semblable à un viol, puisque l’on touche à l’intime sans explication, sans délicatesse, parfois avec violence. La notion de protocole, trop présente dans notre société, entraîne des dommages physiques et moraux, mutilant des femmes dans le seul but d’aller plus vite que la nature, de capitaliser les soins et de libéraliser le monde médical.
Face à des violences toujours plus présentes, les témoignages se multiplient, notamment sur les réseaux sociaux. On peut aussi noter le succès de la BD d’Emma à ce propos et l’apparition de premières études gouvernementales, mais aussi militantes autour de ces questions. Malgré un constat effrayant, il est possible de remédier à cette situation, issue du patriarcat et de la doctrine libérale. D’une part, il est évident que la santé publique nécessite un budget plus conséquent, et que les attaques répétées sur la fonction publique ne feront qu’aggraver les faits évoqués précédemment.
Allier moyens et ambitions pour changer de logique
Augmenter le nombres de postes d’infirmier.ère.s, d’aide-soignant.e.s, de médecins serait absolument bénéfique pour le personnel comme pour les patient.e.s. Malheureusement, ce n’est clairement pas la voie empruntée par le gouvernement. La solution réside également entre les mains des praticien.ne.s. Il est en effet temps de se diriger vers une médecine gynécologique et obstétrique plus respectueuse, basée sur l’écoute et la communication. Examen gynécologique à l’anglaise, médecine douce, nouvelles méthodes d’accouchement : tout cela pourrait en effet être enseigné aux futur.e.s médecins.
Aussi, le constat est à nuancer : le cas de la clinique de Besançon est d’ailleurs pertinent dans cette optique, puisque les épisiotomies y sont éviter au maximum, limitant les risques de blessures graves lors des accouchements. De même, les méthodes ont tout de même évoluées, et la plupart des gynécologues et obstéricien.ne.s ne maltraitent en aucun cas leur patientes, contrairement à ce qu’à l’air de penser Marlène Schiappa, pour qui l’on pratiquerait encore l’épisiotomie dans 75% des cas. Il est cependant important d’accorder la paroles aux victimes de ces actes, parfois barbares, afin de mettre fin au tabou à propos de la souffrance des femmes, de l’argument d’autorité, et finalement du sexisme dans des milieux où il n’est pas évoqué.