Les ultras face à la répression, un football de résistance

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Les ultras face à la répression, un football de résistance

Depuis des décennies, les groupes ultras animent les tribunes de nos stades, portant haut les couleurs de leurs clubs, mais également des valeurs de solidarité, d’antiracisme et d’engagement populaire. Pourtant, aujourd’hui, ces bastions de ferveur sont menacés par une répression politique et policière qui vise à aseptiser les stades et à chasser ceux qui refusent de voir le football sombrer dans le capitalisme et l’élitisme. La récente volonté de Bruno Retailleau de dissoudre les groupes ultras – les Magic Fans, les Green Angels et la Brigade Loire – s’inscrit dans cette logique de répression, bien loin de l’esprit du football populaire.

Les Ultras, une histoire de lutte avec ferveur

Les groupes ultras, bien loin des clichés de “hooligans”, sont depuis longtemps engagés dans les luttes sociales. En France, des collectifs comme les MTP à Marseille, les Red Kaos 94 à Grenoble ou les Ultramarines à Bordeaux défendent un football solidaire, antiraciste et antifasciste. À Marseille, dans une ville où le mélange des cultures est une richesse, la lutte contre l’extrême droite dans les tribunes est un combat historique, et les South Winners, arborant l’emblème du Che, incarnent cette vision d’un football populaire et anticapitaliste.

Cet engagement dépasse les frontières. En Italie, les Ultras de Livourne ont fait de leur tribune un bastion antifasciste. En Allemagne, les ultras du FC Sankt Pauli portent haut les valeurs de la culture alternative, et en Espagne, les Bukaneros du Rayo Vallecano s’opposent à la marchandisation du sport. Partout, ces groupes rappellent que le football est un espace de résistance.

Mais cette ferveur dérange. Les ultras sont devenus un laboratoire de répression pour les forces de l’ordre : interdictions de déplacement, fichages, violences policières… Tout est fait pour aseptiser les tribunes et transformer les supporters, ces animateurs et parties prenantes du stade en des consommateurs passifs, exclusivement cantonnés au statut de client. Et ce, alors que, sans eux, le football perd son âme.

Une répression politique pour un football sous contrôle

En s’attaquant aux Magic Fans, aux Green Angels et à la Brigade Loire, Bruno Retailleau poursuit une logique purement politique. Derrière l’argument des violences et des incidents, c’est une nouvelle offensive contre un football qui échappe au contrôle des élites et du capital.

À Saint-Étienne, les Magic Fans (1991) et les Green Angels (1992) sont bien plus que de simples groupes de supporters. En plus d’animer les tribunes, ils mènent des actions solidaires, s’opposent à l’extrême droite et défendent un football populaire. Comme ailleurs en France, ils subissent une répression croissante : interdictions de déplacement, sanctions collectives et stigmatisation médiatique.

La Brigade Loire, groupe ultra du FC Nantes, est également visée. Connue pour son opposition aux dérives du foot-business, elle refuse de voir son club sombrer entre les mains d’investisseurs avides. Comme les ultras stéphanois, elle défend un football ancré dans sa ville, porté par ses supporters et non par des actionnaires.

Face à cette tentative de dissolution, plusieurs élus de gauche, notamment du PCF, ont exprimé leur indignation. Derrière cette répression, c’est bien une question de classe : on écarte les supporters passionnés pour les remplacer par des spectateurs dociles, prêts à payer toujours plus pour un football aseptisé.

Entre la flambée des prix, la disparition de clubs historiques et la montée des intérêts financiers, le football devient un luxe réservé à une minorité. Le combat des ultras dépasse les tribunes : il incarne la lutte des classes populaires pour préserver leur place dans ce sport de plus en plus élitiste.

Face à cette dérive, les supporters se mobilisent pour défendre un football où la passion prime sur l’argent. Mais la répression des ultras s’inscrit dans une volonté plus large d’aseptiser le football et de le livrer aux actionnaires.Quoi qu’il arrive, on ne dissout pas la mentalité ultra.


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