47 parlementaires issus pour leur majorité de la LREM mais également de LR, proposent de réduire la protection des locataires durant la trêve hivernale. Ils sont signataires d’une tribune intitulée “Trêve hivernale : “Ne laissons pas les locataires et les propriétaires à la rue!” publiée le 5 décembre dans le JDD
Samedi 5 décembre, ces élus se sont rassemblés dans la signature commune d’une tribune dans le JDD. Ils demandent une modification des règles de la trêve hivernale dans l’objectif de renforcer la protection des bailleurs, ils jugent en effet les droits des bailleurs insuffisant face “aux locataires indélicats”.
Leur argumentaire est succinct et porte uniquement sur la nécessité d’après eux de renforcer les droits des propriétaires qui ne peuvent récupérer l’usage de leur bien, face à des locataires qui n’ont plus les capacités financières d’absorber la charge du loyer. La trêve hivernale entrave le droit des propriétaires à engranger leur rente mensuelle. Mais elle est pour les foyers les plus précaires la garantie du maintien de leur solution d’hébergement, cette trêve permet également de ne pas être sujet aux potentielles coupure d’eau, d’électricité ou encore de gaz. Ces mesures ont toujours visé à protéger les plus fragiles d’entre nous, mais la volonté formulée par ces 47 parlementaires est de mettre fin à cette protection des foyers précaires.
Les expulsions locatives reviennent par la fenêtre
Ils demandent, pendant la durée de la trêve hivernale, ” la possibilité pour le juge d’engager l’expulsion du locataire indélicat à la condition qu’une offre d’hébergement d’urgence lui soit proposée […] soumise à une double condition : le caractère modeste du propriétaire et le fait que celui-ci ne dispose d’aucune autre solution d’hébergement » et « en cas d’impossibilité de trouver un logement, la possibilité pour le juge d’ordonner à l’État de prendre à sa charge une partie des frais de relogement du propriétaire modeste et sans solution d’hébergement “.
Cette tribune affirme la volonté de réduire les droits actuels des locataires, alors même que nous traversons en ce moment une crise sanitaire aux conséquences considérables sur l’économie où la précarité ne cesse de croître. Près de 10 millions de français.es vivent sous le seuil de pauvreté, 65 000 ruptures de contrats ont été annoncées entre mars et octobre de cette année, soit plus du triple que l’an dernier à la même période selon la DARES.
Dans ce contexte de crise sanitaire, cette tribune est une attaque aux plus précaires.
Les locataires de plus en plus fragiles
La pandémie du covid-19 a exacerbé les écarts entre riche et pauvre. A l’inverse de proposition permettant d’absorber la précarité, ces parlementaires effectuent un choix sans détour : renforcer le droit de propriété au droit d’usage.
Dans cette tribune ils soulignent pourtant de manière hypocrite que la trêve hivernale est “nécessaire pour protéger les personnes vivant dans une grande précarité”, or le fond de cette proposition est d’annihiler les droits de la trêve, permettre des expulsions au milieu de l’hiver alors que les expulsions locatives croient chaque année déjà.
La fondation Abbé Pierre estime que les expulsions ont augmenté de 41% en 10 ans (chiffres de 2018). Les solutions d’hébergements d’urgence sont saturées depuis des années sans que des politiques publiques soient mises en œuvre en réaction, malgré les engagements de Macron durant sa campagne électorale, le nombre de personnes à la rue est loin de pouvoir tomber à 0, d’autant plus vue la volonté portée par les parlementaires de son camp politique.
Une nouvelle déclaration de guerre aux locataires et aux plus fragiles
Le droit au logement pour les plus précaires n’a de cesse d’être attaqué par la Macronie. Rappelons qu’au début du quinquennat le gouvernement et sa majorité ont fait passer la baisse des APL, augmentant la précarité des foyers les plus précaires, mais également en particulier les jeunes travailleu.rs.ses et les étudiant.e.s. Dans le projet de loi ELAN, ils et elles ont abaissé l’objectif de 100% de logements neufs accessibles aux personnes handicapées à 10%, ne permettant pas au logement de pouvoir répondre à l’évolution des besoins des locataires à tout moment de leur vie.
Fin octobre l’assemblée nationale a définitivement adopté un amendement anti-squat. La disposition adoptée prévoit de modifier la loi de 2007 sur le droit au logement opposable (Dalo) en étendant la notion de “domicile”, en ajoutant: “qu’il s’agisse ou non de sa résidence principale”. Une fois le squat découvert et les faits dénoncés aux forces de l’ordre, le propriétaire du logement, ou ses ayant-droits, saisira le préfet, qui aura 48 heures pour répondre avant de mettre en demeure le ou les squatteurs de quitter les lieux. Le squat n’est certes pas une solution de relogement mais il constitue pour de nombreuses personnes en situation précaire la seule alternative à la rue.
Les solutions à la crise du logement ne sont pas inatteignables, il est possible de réquisitionner des logements vides pour répondre à l’urgence et aux besoins immédiats de relogement. Cela fait plusieurs décennies que des associations du droit au logement comme le DAL (droit au logement) milite pour l’application de ce droit. Ces dernières exigent aussi un moratoire sur les expulsions, la réquisition des logements vides qui devraient être exigée pour reloger toutes personnes en situation de fragilité dignement.