Alors que l’entrée en discussion de la réforme de la SNCF au Sénat a été marquée hier par un coup d’éclat des Sénateurs Communistes dans l’hémicycle, la mobilisation des cheminots continue de vivre sous toutes les formes possibles.
Une bataille de tous les instants
La bataille de l’opinion, les cheminotes et cheminots en ont fait leur combat. Depuis les premières annonces concernant la grève, le travail de dialogue, d’explication et de conviction avec les usagers est au coeur de leurs préoccupations.
Laurent Brun, Secrétaire Général de la CGT Cheminots déclarait d’ailleurs dans une interview accordée ici-même fin mars :
“Nous avons toujours eu du mal à concilier dans nos luttes à la fois les aspects internes du combat, auprès de nos collègues, et de réussir à convaincre les usagers et l’opinion. Nous avons souvent fait soit trop l’un, soit trop l’autre. Cette fois-ci, nous essayons en interne de travailler aux meilleures modalités pour créer le rapport de force et pouvoir tenir sur la durée, notamment durant tout le processus des ordonnances, d’où ces annonces de grève perlée.
Mais nous essayons aussi d’agir de manière à ce que les usagers puissent comprendre notre action. Il y a notamment un point très important c’est que cette réforme ne répond en rien à la principale attente des usagers, c’est-à-dire de pouvoir bénéficier de bonnes conditions de voyage dans des trains à l’heure.”
Si nous avons connu de véritables basculements dans l’opinion sur la question de la grève et du soutien au combat mené, le rouleau compresseur en face est toujours en marche. Un traitement médiatique honteux ( en témoigne les sondages et leur traitement, les sujets et angles choisis, etc), des offensives politiques constantes de la part de la droite, du patronat et du gouvernement, bref la bataille est rude.
Une vot’action réussie
Pourtant une nouvelle est venue mettre la puce à l’oreille des cheminots chez leurs collègues d’ Air France. En effet, les 46 771 salariés d’Air France étaient invités à s’exprimer, via un vote en ligne, sur la question suivante :
« Pour permettre une issue positive au conflit en cours, êtes-vous favorable à l’accord salarial proposé le 16 avril 2018 ? »
Jean-Marc Janaillac, P-D.G. d’Air France-KLM, a voulu cette « consultation », aux airs de référendum, pour contourner l’intersyndicale des pilotes de la compagnie et son refus d’accepter le dit accord, et de désavouer par là-même la grève. Sauf…qu’il a perdu ! Les salariés l’ont en effet rejeté à plus de 55% avec un taux de participation impressionnant dépassant les 80%. Ce qui entraîne en effet domino la démission du PDG Jean-Marc Janaillac et de son DRH, par ailleurs ancien bras droit de Manuel Valls.
Il n’en fallait pas plus aux cheminotes et cheminots pour embrayer le pas ! Si la direction de la SNCF et Guillaume Pepy ont refusé de se prêter au jeu de la démocratie interne au vu des risques encourus, les syndicats ne se sont pas laissé à abattre et ont organisé leur Vot’action dans plus de 564 points de votes, dans l’unité et la combativité.
Les résultats sont sans appels, avec une participation de plus de 61% des salariés, le “Pacte Ferroviaire” du gouvernement est rejeté à près de 95%, de quoi atteindre les clichés des syndicats preneurs d’otages d’autres salariés, en plus des usagers.
Cependant, les retentissements de ce vote ne sont pas les mêmes qu’à Air France. La stratégie de décrédibilisation de la direction, le black out médiatique et les différents tours de passe-passe du gouvernement tentent de faire de cette initiative un non-événement. Hors de questions de ne pas s’appuyer sur cette mobilisation populaire du côté des syndicats, CGT en tête.
Le coup de poker du gouvernement
Si avant l’ouverture des débats au Sénat et dans la foulée de la vot’action, le gouvernement tente un coup de poker autour de la dette, les cheminotes et cheminots ne sont pas dupes.
L’Unsa et la CFDT vers qui le gouvernement tente des courbettes ont bien décidé de rester dans la mobilisation unitaire et l’ont réaffirmé après les annonces d’Edouard Philippe. Pour la CGT, c’est clair :
“Ces annonces sont à mettre au crédit de la lutte, notamment sur la question de la dette et l’organisation d’une table ronde en juin. Elles sont liées à notre stratégie de lutte dans la durée. Le Combat continue.”
Analyse appuyée par SUD-Rail qui continue d’appeler à une “mobilisation nécessaire” jugeant que “ces annonces ne sont pas de nature à faire cesser la grève”.
Après des mois de luttes, la fin n’est toujours pas à l’ordre du jour donc pour les cheminotes et cheminots qui en appellent plus que jamais à la mobilisation populaire pour défendre la SNCF comme bien commun. Appel entendu dans l’hémicycle par les sénateurs et sénatrices communistes mais qui devra s’articuler avec une mobilisation plus large dans tout le pays pour, enfin, faire plier le gouvernement.