Quand la droite catholique s’alliait aux intégristes musulmans pour faire taire Charlie 

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Quand la droite catholique s’alliait aux intégristes musulmans pour faire taire Charlie 

Au jeu du pire adversaire de Charlie Hebdo, et donc de nos libertés, le Front National et ses innombrables procès intentés à la rédaction n’a d’égal que l’alliance de la droite catholique et des intégristes musulmans. 

Au fond, les religieux en politique ne reprochent-ils pas aux frères Kouachi d’avoir fait taire par les armes ceux qu’ils voulaient faire taire par la loi ? 

2006: L’affaire des caricatures ou l’affaire de la barbarie djihadiste ? 

En 2006, le monde est secoué par la très mal-nommée “affaire des caricatures”. Ne laissons pas croire en effet que l’événement le plus grave de cette affaire sordide ait été un quelconque dessin. Ladite affaire commence en 2004 par l’assassinat ignoble de Theo van Gogh, journaliste auteur d’un film sur la place des femmes en Islam, qui reçut pour cela huit balles de pistolet automatique avant d’être égorgé en pleine rue et que soit déposé sur son cadavre une lettre menaçant sa co-réalisatrice et, puisque c’est toujours l’obsession des islamistes, les Juifs. 

En réaction, le Jyllands-Posten, journal danois, publie en 2006 douze caricatures d’un célèbre chef de guerre qui arpenta le désert de la péninsule arabique au VIIᵉ siècle. Cette publication déclencha des manifestations sur l’ensemble de la planète, les musulmans du monde entier étant sommés de se sentir offensés par les plus ardents théocrates. Plusieurs attentats sont déjoués. Certains aboutissent, comme celui qui fît six morts à l’ambassade danoise d’Islamabad. 

Définitivement, le problème de cette affaire n’est pas la caricature d’un homme qui entendait des voix il y a quatorze siècles. Il se trouva pourtant des organisations religieuses, des chefs d’États et même des journalistes pour faire de la publication des dessins, et non des meurtres, le cœur du problème. C’était la faute du Jyllands-Posten et, en France, de Charlie qui avait repris ces caricatures. 

Le bon grain, l’ivraie ou comment les lâches et les opportunistes soutinrent les censeurs

Au premier chef, il y a bien sûr l’ensemble de l’islam politique, chefs d’États, clergé, réseaux fréristes qui soufflèrent sur les braises dans la rue, attisant les manifestations violentes qui firent plusieurs dizaines de morts et dans les réseaux diplomatiques, rompant les relations avec plusieurs pays d’Europe. La crise diplomatique alla jusqu’à l’ONU où la Ligue arabe mît au vote une résolution “contraignante, interdisant le mépris des religions et prévoyant des sanctions.”

Le phare de la civilisation, pays symbole de la liberté, fît connaître par la voix de son ancien président Bill Clinton que “les journaux avaient fait un usage abusif de la liberté de parole”. Il fût rejoint en ce sens par Jacques Chirac qui appela « chacun au plus grand esprit de responsabilité, de respect et de mesure pour éviter tout ce qui peut blesser les convictions d’autrui ». Le pape Benoît XVI déclara « nécessaire et urgent que les religions et leurs symboles soient respectés ». Le décor était planté, les journalistes menacés de mort l’avaient bien cherché, et il ne manquait plus grand chose pour que la droite, grande adversaire historique de la laïcité, ne se joignent aux islamistes pour demander le retour du délit de blasphème. 

C’est fait le 28 février 2006, avec le dépôt d’une proposition de loi “visant à interdire les propos et les actes injurieux contre toutes les religions” par le député UMP Jean-Marc Roubaud. Cette proposition de loi vise à ajouter à la loi de 1881 sur la liberté de la presse le passage suivant : “Tout discours, cri, menace, écrit, imprimé, dessin ou affiche outrageant, portant atteinte volontairement aux fondements des religions, est une injure.” Les républicains (les vrais, ceux qui se désignent ainsi en référence à la Révolution française et pas au grand frère yankee) ayant pris quelques mesures préalables dans le fonctionnement de nos institutions, cette proposition de loi ne sera pas mise au vote. Reste l’intention et le dégoût. 

Le combat pour la laïcité est le combat pour notre liberté

Ce que montre cette affaire, c’est que la liberté d’expression, la liberté de critiquer une religion, la non-reconnaissance par l’État d’un livre ou d’un individu sacré, sont le fondement de nos libertés. Ôtez la liberté de caricaturer un prétendu prophète et bientôt, nous n’aurons plus le droit de critiquer la religion, ni donc de contester les dogmes, les modes de vie, la vision rétrograde de la société qu’elles veulent toutes imposer. La France le sait mieux que quiconque, elle qui fût la fille aînée, mais éternelle mineure, de l’Église, avant d’obtenir son émancipation en 1789. 

Quant aux croyants, qu’ils pardonnent à ceux qui les ont offensés, il paraît que le geôlier du paradis céleste compte les bons points. 


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