Des recrutements sous forme de formation rémunérée avec une garantie d’embauche pourraient permettre de réduire le chômage des jeunes et de sauver l’avenir de plusieurs secteurs économiques.
Des millions de jeunes laissés sans solution réelle
Le chômage des jeunes actifs était déjà écrasant avant la crise économique et la pandémie : 1 jeune sur 5. Depuis, les contrats courts se font plus rares, les refus d’embauche s’accumulent, les promesses d’embauche ne peuvent plus être tenues. Des centaines de milliers de jeunes sont en plus arrivés sur un marché de l’emploi saturé.
Plus licenciés que les autres classes d’âges, les jeunes travailleurs sont particulièrement fragiles face au risque de chômage, la faute à l’enchaînement des contrats précaires. Les jeunes sont confrontés à des offres d’emploi qui ne correspondent pas du tout à leur formation ou à leurs aspirations, comme le disent plusieurs dans L’humanité.
Face à cette situation, le “plan” du gouvernement tombe à côté. Prévoyant seulement 600 000 dispositifs, alors que les jeunes sont presque 2 millions selon ses propres chiffres à avoir besoin d’accompagnement, il finance des contrats courts précaires et mal payés, en entraînant les jeunes dans une spirale de chômage et de précarité. Des emplois subventionnés qui disparaissent au terme de la subvention.
La garantie jeune prévue aussi par le plan ne constitue pas une aide financière suffisante. Elle peut être parfois très faible, autour d’à peine 100 euros par mois. Par ailleurs, les missions locales n’ont pas assez de personnel pour accompagner les jeunes.
Les fameux 100 000 services civiques supplémentaires promis par le gouvernement sous-paient les jeunes à 580 euros par mois pour 24 heures par semaine, principalement pour pallier le manque de personnel dans les services publics et exercer des fonctions qui devraient être payées au moins au SMIC.
Pré-recruter les jeunes, bon pour l’emploi et la formation
Le soi-disant plan du gouvernement consiste à faire des cadeaux au patronat pour maintenir la rentabilité, en finançant des dispositifs pour relativement peu de jeunes et peu intéressants pour eux, puisqu’ils ne les sortent que très peu de temps de la privation d’emploi.
Ce que les jeunes veulent, c’est avoir un emploi ou une formation, et ne pas se retrouver sans rien et sans aucun filet de sécurité.
Les organisations de jeunesse ont demandé dès le printemps dernier l’ouverture du RSA au moins de 25 ans, comme mesure d’urgence pour assurer un filet de sécurité aux jeunes, sans lequel la recherche d’emploi est mission impossible. De nombreux appels et mobilisations ont été initiés, mais le gouvernement reste sourd.
Néanmoins, la proposition formulée par les jeunes communistes de pré-recrutements des jeunes permet de répondre à la fois à l’aspiration à une formation et à celle à un emploi.
Il s’agit de cibler immédiatement des secteurs stratégiques de l’économie, en commençant par les entreprises publiques et fonctions publiques, pour exiger des formations rémunérées ouvrant à une embauche en CDI ou au statut. Par exemple, là où il manque du monde, dans la santé, dans les transports, dans l’énergie, dans l’éducation…
Cela permettrait à la fois aux jeunes de sortir du chômage et de la précarité qui le nourrit, de se former convenablement avec des perspectives d’emploi, et enfin de répondre aux besoins de production et de services publics.
L’État pourrait imposer ces pré-recrutements, dans le secteur public en tant qu’employeur ou en tant qu’actionnaire majoritaire, ou dans le secteur privé en conditionnant les aides aux entreprises.
Les salariés ne vont pas attendre et luttent dès à présent pour des embauches dans leurs secteurs d’activité, en particulier en dénonçant l’utilisation de l’argent public par les entreprises et en revendiquant 10% de recrutement dans le public.
Les pré-recrutements, utiles à la production et aux services publics
Le marché du travail est pris dans une contradiction : les besoins sociaux progressent énormément, mais les capitalistes n’embauchent pas suffisamment voire suppriment des emplois pour relever la rentabilité du capital.
Les salariés et les syndicats le disent pourtant : il y a besoin de monde partout ! Alors que le chômage ne cesse de progresser, l’exigence de réduction du temps de travail ou de transition écologique de la production se font de plus en plus entendre.
Dans les colonnes d’Avant-Garde, plusieurs responsables syndicaux ont fait remarquer ces dernières semaines la pertinence de recruter des jeunes dans leur branche professionnelle.
Laurent Brun, secrétaire général de la CGT cheminots, pointait l’absence de stratégie industrielle de la part du gouvernement, les suppressions d’emplois à la SNCF, les délocalisations dans la métallurgie, et l’inefficacité de la sous-traitance, qui mettent à mal la capacité à développer le ferroviaire en France.
Il montrait que la ré-internalisation des salariés du ferroviaire avec une vraie stratégie industrielle portée un monopole public permettrait au moins 100 000 embauches au statut des cheminots.
Un des problèmes qu’il soulevait, c’est que les milliers d’alternants et apprentis à la SNCF n’ont plus de garantie de recrutement. Laurent Brun proposait notamment le recrutement de jeunes sans diplôme pour les amener dans l’entreprise de postes non qualifiés avec de la formation professionnelle jusqu’à des postes qualifiés. Au lieu d’embaucher forcément des travailleurs déjà formés et sous-traiter les postes non qualifiés, l’employeur public prendrait en compte sa responsabilité sociale de former les jeunes.
Olivier Munoz, secrétaire du PCF RATP, allait dans le même sens. Les besoins de développement des transports en commun en Ile-de-France sont gigantesques, mais la direction de la RATP prend le chemin du développement de la sous-traitance, des suppressions d’emplois, et de l’ouverture du secteur à la concurrence. De plus, une partie de l’argent dépensé par le public, les employeurs et les usagers est détourné dans le versement de dividendes à des actionnaires. Pendant ce temps, des compétences en interne sont perdues à cause du déficit d’embauches… Pareil, Olivier Munoz révélait que l’entreprise fait le choix de ne pas recruter les jeunes qu’elle forme (en privilégiant les contrats de professionnalisation aux contrats d’apprentissage).
Pendant que les salariés de l’énergie sont en pleine bataille contre la liquidation du statut du secteur (IEG), la division du groupe EDF et du groupe GDF en plusieurs entités plus ou moins rentables, Cédric Liechti (CGT Energie Paris) dénonçait la poursuite de la privatisation du secteur stratégique et revendiquait l’embauche de tous les sous-traitants et prestataires au statut du service public de l’énergie.
Pour donner un dernier exemple : à Airbus, Michel Molesin (CGT Airbus) dénonçait le détournement de l’argent public par Airbus et la suppression de milliers d’emplois alors que le carnet de commandes est plein et que les projets de développement sont énormes. Il disait que tous les alternants du lycée Airbus avaient été mis à la porte, ce qui pose le risque de perdre le savoir-faire et de ne pas pouvoir répondre aux besoins, une fois de plus.
Ces exemples de secteurs où il faudrait recruter massivement des jeunes, pour passer d’une logique de rentabilité à une logique de service public et de développement de la production, sont en lien avec les luttes actuelles des salariés contre les plans de licenciements. Mais, ce qui vaut pour ces secteurs vaut pour tous les autres, et Avant-Garde continuera dans les prochaines semaines à le démontrer.