Le Nouveau Front populaire finance son programme

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Le Nouveau Front populaire finance son programme

L’alliance de gauche a présenté vendredi dernier le chiffrage et le financement de son programme. Aucune autre force politique n’en a fait autant.

Avec un programme qui augmente les dépenses publiques pour la justice sociale, le Nouveau Front populaire veut montrer sa capacité à aller chercher de nouvelles sources de financement, en faisant payer les plus riches et les grandes entreprises.

Pas d’aggravation de la dette publique

Si une majorité de députés du Front populaire est élue, les dépenses publiques vont progressivement être revues à la hausse. Il faut prévoir 25 milliards d’euros supplémentaires en 2024, 100 en 2025 et 150 en 2026. Cependant, la gauche vise en parallèle une amélioration de la dette de la France que les années Macron ont portée à 3 100 milliards d’euros.

La gauche argumente que l’aggravation du déficit du budget de l’État est due aux cadeaux faits aux plus riches ces dernières années. En bref, les dépenses publiques ne sont pas responsables du déficit, mais c’est la baisse des recettes qui l’est.

C’est pourquoi le Nouveau Front populaire finance les besoins sociaux avec de nouvelles recettes publiques.

De la justice fiscale pour financer des mesures sociales

Pourquoi les dépenses vont-elles augmenter avec la gauche au pouvoir ? Dès 2024, pour augmenter les salaires, notamment dans la fonction publique, pour abroger les réformes des retraites et de l’assurance-chômage, pour augmenter les aides au logement et pour la gratuité des cantines scolaires ; autant d’améliorations du pouvoir d’achat pour la classe travailleuse.

Les impôts vont-ils augmenter ? Cela dépend pour qui. Le Nouveau Front populaire souhaite mettre fin aux cadeaux fiscaux pour les plus riches et les faire contribuer davantage au budget de l’État.

Plusieurs mesures sont prévues : le retour de l’impôt de solidarité sur la fortune (qui rapportera plus qu’avant, car la fortune des plus riches a explosé sous Macron) ; la taxe sur les superprofits ; une meilleure progressivité de l’impôt sur le revenu, qui augmentera pour les 8 % les plus riches ; une plus juste imposition des revenus du capital, etc.

Nouvelle logique économique

Au-delà de la réforme de la fiscalité pour la rendre plus juste, c’est toute une logique économique qui doit changer avec le Front populaire.

Il est question de changer les aides publiques aux entreprises, en arrêtant de les concentrer sur les grandes entreprises qui versent des dividendes à leurs actionnaires et délocalisent l’emploi.

En plus de profiter en priorité aux petites et moyennes entreprises, les aides aux entreprises seront dorénavant conditionnées à des critères sociaux et environnementaux, notamment sur l’emploi et les salaires, pour garantir leur efficacité.

Un pôle public bancaire permettra de faire des avances aux services publics avec des taux d’intérêt nuls ou négatifs, pour arrêter d’endetter l’État sur les marchés financiers (la France paie actuellement 50 milliards d’euros par an pour les intérêts de la dette). Ce pôle public aidera également les petites et moyennes entreprises en situation difficile et qui souhaitent se développer, en les libérant des intérêts bancaires.

L’élargissement des pouvoirs d’intervention des salariés dans l’entreprise favorisera enfin que les richesses soient efficacement utilisées pour l’économie réelle, plutôt que pour les appétits financiers.

Le coût du capital

Pour aller plus loin et réussir ses ambitions sociales, le Front populaire devra affronter le coût du capital et son pouvoir sur la politique économique.

C’est ce que défendent six économistes et syndicalistes de la fédération CGT des Finances dans une tribune. Pour eux, le plus important à l’avenir est de baisser le coût du capital, afin d’améliorer l’efficacité économique des entreprises et relancer la production en France.

Cela veut dire utiliser l’argent des entreprises qui va actuellement au capital (les dividendes versés aux actionnaires, les intérêts payés aux banques, etc.) pour le réorienter vers des dépenses pour l’emploi, la formation, la recherche et les services publics.

En effet, il ne s’agit pas seulement de relancer la demande et la consommation des ménages, car, en l’état, ça ne ferait qu’augmenter les importations, mais il faut aussi agir sur la production, la création d’emploi et le développement des capacités humaines dans les entreprises.

Et toujours de la dette ?

Si le Front populaire ne va pas aggraver la dette de l’État, va-t-il l’améliorer en définitive, pour retrouver des capacités d’investissement à long terme ?

« On n’a pas un excès de dépenses, mais un déficit de recettes », affirmait le sénateur communiste Éric Bocquet dans La Voix du Nord début avril. Auteur du livre La dette à perpète ? il dénonce la mainmise des marchés financiers sur la dette publique.

En possédant la majeure partie de la dette de l’État, les marchés peuvent imposer une politique néolibérale à la France. Il faudra sortir de leur emprise pour reprendre la maîtrise de nos choix démocratiques. Cela veut dire utiliser l’argent des banques, notamment à l’aide de nationalisations, pour s’émanciper du pouvoir de l’argent.


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