Alors qu’elle devrait être une solution incontournable pour répondre aux défis auxquels nous sommes confrontés, la formation professionnelle est attaquée et dévalorisée.
Alternance, bac professionnel, apprentissage… Ces formations sont souvent considérées comme des voies « garages » dans lesquelles reléguer les élèves les plus en difficultés.
Pour inverser la tendance, nombreux sont ceux qui plaident pour un nouveau fléchage des budgets et pour une planification des formations.
Un nouveau statut du stagiaire
Les dernières réformes de la voie professionnelle ont cela en commun : former le plus rapidement possible une main-d’œuvre peu chère et malléable, afin de répondre aux besoins immédiats des entreprises.
Les élèves concernés sont donc ceux qui subissent le plus les politiques de ségrégation, de précarisation et d’invisibilisation dans le débat public. Les stages et contrats d’alternance sont difficiles à trouver, peu rémunérés et insuffisamment formateurs.
Pour en finir avec cette image dévalorisante, nous avons besoin de faire évoluer ces formations. Un levier existe : celui des stages. En garantissant une rémunération juste, des stages plus formateurs et des contrats mieux encadrés, un nouveau statut du stagiaire permettrait d’ouvrir des perspectives pour ces milliers de jeunes.
Planifier pour répondre aux besoins du pays
Michelin, Latécoère, Valeo ou encore ArcelorMittal… L’actualité nous montre que la France connaît de grandes difficultés industrielles. Les besoins sont importants, et exigent un développement de nos outils et de nos structures.
Mais investir dans la recherche et construire des infrastructures ne sert à rien si nous ne sommes pas en mesure de former, en parallèle, les jeunes ingénieurs, les techniciens, les ouvriers qui feront tourner la boutique.
En identifiant les besoins stratégiques, il est possible de prioriser les filières de formations indispensables. Ingénierie, technique, métiers manuels : l’ensemble des défis auxquels nous faisons face exigent des compétences précises.
Pour réinvestir ces secteurs, il faut tendre vers une planification des formations, ce qui nécessite de dépasser la logique actuelle dictée par les besoins locaux et immédiats des patrons, dont, en premier lieu, le profit.
Un coût, ou un investissement sur l’avenir ?
Cette planification des formations repose sur deux piliers : d’une part, une identification des secteurs prioritaires et de l’autre, une réorientation des fonds publics.
Un exemple : en 2024, plus de 25 milliards d’euros d’aides publiques ont été distribués aux entreprises qui embauchent des apprentis. Pour autant – selon la DARES – , seulement 44% des apprentis réalisent leur insertion dans leur branche de formation. Ces aides n’ont donc pas permis de former efficacement des jeunes.
Nous pouvons à l’inverse imaginer que cet argent soit réorienté vers l’ouverture de filières qualifiantes et utiles en lycée professionnel. En moyenne, le coût d’ouverture initiale d’une filière se situe entre 500 000 et 2 millions d’euros, sans prendre en compte les coûts de fonctionnement annuel.
Une simple réorientation des budgets déjà destinés à la formation professionnelle nous laisserait donc une grande marge de manœuvre. Ce redéploiement des financements donnerait du sens à ces parcours, en les plaçant au cœur de nos besoins de transformation du pays.
Une opportunité historique ?
La transformation de la formation pro présente une chance unique de marcher sur « nos deux jambes » : répondre aux besoins industriels, tout en permettant à une nouvelle génération de travailleurs de se former et de s’émanciper dans des boulots utiles.
Avec une planification des formations adaptées, il devient possible de construire des ponts entre les jeunes, les filières stratégiques, et les grands défis auxquels nous sommes confrontés.