En Espagne, une mobilisation d’ampleur pour le droit au logement

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En Espagne, une mobilisation d’ampleur pour le droit au logement

Une mobilisation qui ne faiblit pas

5 avril, Madrid : cent-cinquante mille espagnols défilent dans la capitale. Et ce n’est pas tout, c’est également dans une quarantaine de villes de Séville à Barcelone et jusqu’aux Îles Canaries, que manifestent les locataires espagnols. Parmi eux, beaucoup de jeunes : « On est sept dans le même appart ! Autant dire que l’émancipation est loin ! » explique à Libération Blanca, une étudiante de 27 ans.

« Je sens qu’il y a une grande rébellion qui couve. On se bouge, on s’agite, on manifeste de la colère, mais il va arriver un moment où tout cela va déborder » renchérit Julia, étudiante elle-aussi. Si aucune autre date de mobilisation n’a encore été annoncée pour l’instant, tout porte à croire que le mouvement n’en est qu’à son commencement. C’est que, ces dernières années, le logement est devenu l’une des principales préoccupations des Espagnols : 84 % déclarent se sentir préoccupés par cette question.

Les raisons de la crise

En cause, une hausse des prix pratiquée ouvertement par de nombreux propriétaires, désireux de tirer profit de l’arrivée de touristes ; Airbnb est particulièrement pointée du doigt. Ainsi, entre 2014 et 2024, les loyers ont en effet déjà bondi de 158 % aux Baléares, de 139 % dans la communauté de Valence et de 107 % aux Canaries. Même chose à Madrid et en Catalogne, où les loyers ont doublé sur la même période. Si bien qu’aujourd’hui, les Espagnols dédieraient 42 % de leurs revenus au logement ; jusqu’à 60 % dans les grandes villes touristiques.

L’inaction du gouvernement est également mise en cause : « Les institutions ont échoué au moment de développer un parc locatif public et rien n’a été fait pour éviter la spéculation immobilière », explique pour La Croix José Carlos Luiz, professeur de sociologie. La part de logements sociaux en Espagne ne s’établit qu’à 2,5 %, contre une moyenne européenne de 8 % selon l’OCDE.

Le gouvernement sous pression

Le gouvernement socialiste a annoncé de premières mesures. « Trop d’Airbnb, pas assez de logements » : son président Pedro Sánchez dit être prêt à mettre en œuvre une taxe de 100 % sur les biens immobiliers achetés par des étrangers. Mais malgré des annonces chocs, le gouvernement semble surtout privilégier des mesures incitatives, à l’image d’exonérations fiscales pour les propriétaires acceptant de louer selon un « indice de référence ».

Pour le Parti communiste espagnol, il faut aller plus loin : sanctions contre les gouvernements régionaux n’appliquant pas les limites de prix, interdiction des nouveaux logements touristiques et augmentation des taxes sur ceux déjà existants, indexation des loyers sur un « indice public »… Le parti voit dans la « planification publique et démocratique » la clé pour répondre à la crise.


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