Démographie : quelles sont les tendances ?

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Démographie : quelles sont les tendances ?

Il n’y a ni trop de naissances ni pas assez, il y a des dynamiques qui vont conduire à des choix politiques.

On fait grand bruit de la chute du nombre de naissances en France (moins de 700 000 par an depuis 2023, après des générations 2000-2015 nombreuses d’au moins 800 000 personnes).

Il y a beaucoup d’alarmisme : certains alertent sur la catastrophe de la dénatalité et du vieillissement du pays, d’autres y voient un encouragement pour la décroissance de l’économie et la sauvegarde de la planète.

Toutefois, il faut d’une part interpréter avec beaucoup plus de prudence la natalité française, d’autre part décentrer le regard et resituer les projections démographiques dans un contexte mondial.

Moins de naissances, temporairement ?

Déjà, pourquoi fait-on moins d’enfants depuis quelques années ? Selon l’Institut national d’études démographiques, c’est d’abord que les générations en âge de procréer sont aujourd’hui moins nombreuses que celles d’il y a plus de dix ans.

Comme il y a eu une forte baisse de naissances dans les années 1990, les femmes de 25-34 ans sont actuellement moins nombreuses et font donc moins d’enfants que leurs aînées.

En revanche, les personnes nées entre 2000 et 2015 sont très nombreuses et devraient donc faire plus d’enfants dans les années 2030.

Cette tendance sera plus ou moins importante en fonction de la fécondité : si elle se stabilise à 1,8 enfant par femme, si elle remonte un peu ou si elle rejoint la moyenne européenne de 1,6. La fécondité devrait rester en dessous du seuil de renouvellement des générations, mais cela ne suffit pas à faire baisser une population.

La France ne va pas se dépeupler

Pour réaliser ses projections de population, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) prend en compte la fécondité, mais aussi d’autres facteurs comme l’espérance de vie et le solde migratoire.

Dans le scénario central de l’Insee, la France connaît des variations de population très mesurées. De 68 millions de personnes aujourd’hui à un peu plus de 69 millions en 2044, puis de nouveau 68 millions en 2070. On est très loin du dépeuplement.

L’Insee prévoit dans ce scénario plus de décès que de naissances à partir de 2035, mais ce déficit est compensé par le solde migratoire (qui serait deux fois plus faible que celui d’aujourd’hui) jusqu’en 2044. Par la suite, la population diminuerait de 0,1 % par an.

Néanmoins, dans le scénario « population basse », une baisse simultanée de la fécondité et du solde migratoire, ainsi qu’une stagnation de l’espérance de vie, ferait diminuer la population française à son niveau de 1990 d’ici à cinquante ans. On n’y est pas encore.

Une France vieille ?

La tendance certaine dans les différents scénarios de l’Insee, c’est le vieillissement de la France. Il est clair que le nombre de personnes âgées de plus de 65 ans va croître fortement par rapport à celui des personnes en âge de travailler.

On pourrait se faire peur, car un actif va devoir contribuer pour plus d’inactifs qu’actuellement.

On aurait cependant tort de vouloir plus d’enfants pour faire face au nombre de vieux, car un enfant est aussi une personne qui ne travaille pas et qui d’ailleurs travaille de plus en plus tard avec l’allongement des études. Les actifs contribuent aussi pour les enfants et leur scolarisation, pas seulement pour les retraités.

Surtout, se faire peur ne rime pas à grand-chose, et on oublierait deux leviers très importants pour répondre aux besoins d’éducation des jeunes et de retraite des vieux : la productivité du travail et le taux d’emploi de la population en âge de travailler.

Un actif de 2024 produit en moyenne beaucoup plus de richesses qu’un actif de 1964. Depuis un siècle, la productivité horaire a augmenté de 2,5 % en moyenne chaque année. Le problème est que depuis quelques années les gains de productivité sont en berne, faute d’investissements suffisants dans la formation, la recherche et le développement productif.

Sur le taux d’emploi, on voit que les inégalités entre les femmes et les hommes pèsent encore lourd sur l’économie française (il y a encore un écart de 5 points). Le fort chômage des jeunes est un autre handicap. Toutefois, le taux d’emploi en France est en augmentation constante depuis quinze ans et ça pourrait continuer.

Rien d’insoluble en soi. On peut avoir simultanément plus d’inactifs, plus d’actifs en emploi, une meilleure productivité du travail et une autre utilisation des richesses produites.

La France a des problèmes de riches ?

Certes, la France doit faire des choix face à son vieillissement croissant, mais elle est loin d’avoir un défi démographique aussi grave que d’autres pays.

Selon les projections des Nations unies, de nombreux pays vont connaître une baisse spectaculaire de leur population d’ici 2100. La Chine, la Corée, le Japon, notamment, vont perdre la moitié de leurs habitants, avec un vieillissement nettement accéléré. La Russie, le Brésil, l’Italie, la Turquie, l’Ukraine, ou encore la Pologne vont perdre également des dizaines de millions de personnes.

Le vieillissement de la population ne concerne pas seulement la France et les variations de population sont bien plus importantes ailleurs.

Pour les pays dont la population va augmenter, les choses ne sont pas plus simples. Certains vont doubler, voire plus : Nigéria, Éthiopie, Égypte, Congo, Kenya, Soudan, Irak, Afghanistan, Yémen, etc.

Rappelons que la hausse formidable de la population mondiale ces derniers siècles a été liée à des progrès impressionnants de l’espérance de vie, de la santé, de l’alphabétisation et du niveau de vie. Les baisses localisées de populations ne remettent pas en cause ces avancées.

En tout cas, selon les Nations unies, le monde ne va pas se dépeupler puisqu’il devrait cumuler à 10 milliards d’êtres humains à la fin du siècle.


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