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Les entreprises françaises : meilleures sur l’égalité professionnelle…
Le cabinet Equileap a publié son dernier baromètre sur l’égalité professionnelle. Cette étude comprend 3.702 entreprises d’une capitalisation supérieure à 2 milliards de dollars sur deux ans dans 23 pays.
Dans ce classement la France apparaît en très bonne position puisqu’elle arrive en tête du classement des pays assurant le mieux l’égalité femmes-hommes dans les entreprises. Parmi le top 10 des entreprises, trois sont françaises (l’Oréal, Kering et Orange).
Mais ce qui fait la force de la France dans ce classement, c’est la place des femmes dans les conseils d’administrations encadrées depuis 10 ans par la loi Copé-Zimmerman qui imposait un quota de 40% de femmes. À noter que sur l’ensemble des organes de direction les femmes ne sont que 17%. De quoi faire douter de la fiabilité d’un tel critère.
Mais d’après le Figaro, dans son édition du 8 mars, le problème viendrait des investisseurs qui auraient des « biais cognitifs qui les empêchent de faire confiance aux femmes ». On voit ici la limite du féminisme libérale qui ne voit que l’angle des conseils d’administration et des hauts postes dans l’entreprise, quand le problème est à la base, dans les discriminations salariales.
Le rapport note également que « les entreprises des pays où la législation sur l’égalité de genre est la plus forte ont de meilleurs résultats ». Cela semble donc être le cas de la France que l’on peut pourtant examiner à l’aune de l’index pour l’égalité que chaque entreprise doit publier avant le 1er mars de chaque année.
… Ou seulement les moins pires ?
La publication de l’index de l’égalité depuis 2019 permet d’avoir de nouvelles données sur la question de l’égalité professionnelle. Si Elisabeth Borne, ministre du travail, se félicite d’une meilleure publication de l’index par les entreprises et des progrès des grandes entreprises, les résultats sont loin d’être satisfaisants si l’on creuse un peu.
L’écart brut entre les deux sexes a crû pour s’établir à 28%. À poste égal pour un temps de travail égal, les écarts de salaire sont eux à 9%. Ce second chiffre se rapporte à la différence entre un homme et une femme placé dans les mêmes conditions, quand le second comprend tous les facteurs explicatifs d’une différence de salaire (diplôme, poste, temps partiel, etc.) montrant ainsi des inégalités à tous les niveaux.
L’index de l’égalité prend en compte quatre indicateurs : l’écart de rémunération, l’écart du taux d’augmentation et de promotion, le retour de congé maternité (notamment sous l’angle de l’augmentation due à ce moment-là) et les dix plus hautes rémunérations.
Des indicateurs potentiellement biaisés donc. On notera par exemple qu’une entreprise qui augmente autant de femmes que d’hommes mais qui augmente les hommes de 0,5% et les femmes de 0,25% obtiendra la note maximale de 20 points.
Le regard est d’ailleurs encore porté sur les hauts revenus. Nouvelle trace du féminisme libéral qui réduit l’égalité professionnelle à une parité dans les 10 plus hautes rémunérations et dans les conseils d’administrations mais qui ne s’intéresse pas à la répartition des postes, aux bas salaires, à l’accès des femmes à la formation professionnelle pour évoluer ou aux violences sexistes et sexuelles.
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Pourtant la ministre assure que son administration va sévir. Un effort qui permettra peut-être de dépasser les jusqu’ici 11 pénalités financières attribuées depuis 2019 pour avoir eu une note trop faible, indiquant des inégalités profondes, alors qu’elles étaient 800 sous le seuil de 75/100.
La situation ne s’arrangera pas avec la crise économique qui frappe les emplois les plus fragiles, qui sont déjà occupés majoritairement par des femmes. On peut notamment penser aux emplois à temps partiel. S’il n’y a aucun motif pour se réjouir, il y en a pour agir.