L’évolution est un processus lent qui amène à l’apparition de nouvelles espèces et à la disparition d’autres. Cependant, le ratio apparition/extinction est loin d’être constant au cours des temps géologiques. On parle de période d’extinction massive lorsque au moins 75 % des espèces, que ce soit sur Terre ou au sein des océans, disparaissent sur une courte période.
Depuis l’apparition de la vie sur Terre, cinq extinctions de masse se sont déjà produites. Selon les scientifiques, nous entrons actuellement dans la sixième. La différence avec les autres ? C’est la première d’origine anthropique, autrement dit, dû à la présence d’humains.
La petite histoire des grandes extinctions
Cinq extinctions de masse ont déjà eu lieu au cours des temps géologiques. La plus meurtrière, la troisième, il y a 252 millions d’années, a vu la disparition de 95 % des espèces.
L’une des principales causes des extinctions massives semble être des changements majeurs dans le cycle du carbone terrestre. La formation de grandes provinces volcaniques a provoqué des éruptions qui ont projeté des quantités massives de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Les puits de carbone se sont retrouvés dans l’incapacité d’absorber de telles quantités de CO2. Cela a donc entraîné un réchauffement planétaire et une diminution d’O2 dans les océans.
Ainsi, les crises biologiques que sont les grandes extinctions sont étroitement liées à la géologie et sont d’ailleurs utilisées pour définir les ères géologiques. Par exemple, la quatrième extinction de masse est aussi appelée “crise du Permien-Trias”. Elle marque le passage de l’ère du Paléozoïque à celle du Mésozoïque.
La dernière extinction de masse est sûrement la plus connue. Aussi appelée crise du Crétacé-Tertiaire, elle marque le passage de l’ère du Mésozoïque à celle du Cénozoïque. Elle remonte à 66 millions d’années et a entraîné la disparition des dinosaures. On est donc encore bien loin de l’apparition d’Homo sapiens et on ne peut, pour une fois, pas lui jeter la pierre.
Comme les quatre extinctions précédentes, l’extinction du Crétacé-Tertiaire était d’origine naturelle. Si les débats autour des causes de cette extinction continuent, il est probable qu’elle soit le résultat d’une convergence d’événements. Tout d’abord, un refroidissement, il y a un peu plus de 66 millions d’années, a contribué à fragiliser les populations. Ensuite, une province volcanique s’est formée en Inde – les Trapps du Dekkan – et a causé les effets dont nous parlions plus tôt.
Enfin, un astéroïde de plusieurs kilomètres de diamètre s’est écrasé dans le golfe du Mexique – le cratère de Chicxulub. En percutant la Terre, l’impact de l’astéroïde a immédiatement envoyé une quantité considérable de poussière dans l’atmosphère, occultant le soleil et provoquant une chute brutale des températures sur plusieurs centaines d’années.
Bien que les extinctions de masse soient des événements mortels, elles ouvrent la voie à de nouvelles formes de vie. Suite à la disparition des dinosaures terrestres, les mammifères se sont répandus sur Terre.
Une sixième extinction engendrée par l’activité humaine
Bien que nous n’ayons pas encore franchi le seuil des 75 % caractérisant les extinctions de masse, cela ne veut pas dire que les choses vont bien. Selon le Muséum d’Histoire Naturelle, depuis 1500, 7,5 à 13 % des espèces animales et végétales auraient disparu, contre un taux de 0,04 % estimé jusqu’alors. Cela représente 150 000 à 260 000 espèces éteintes en un peu plus de 500 ans. Si la tendance d’extinction actuelle se poursuit, nous pourrions atteindre le seuil des 75 % d’ici 240 à 540 ans.
Évidemment, le changement climatique actuel est l’un des facteurs de cette sixième extinction. L’utilisation de combustibles fossiles par l’Homme, injectant chaque année des milliards de tonnes de dioxyde de carbone et d’autres gaz à effet de serre dans l’atmosphère, agit comme les grandes provinces volcaniques responsables des extinctions passées. Et bien que le volume total de CO2 libéré par les volcans soit largement supérieur aux émissions anthropiques, ces dernières sont plus rapides et le changement climatique se trouve accéléré.
Outre le changement climatique, cette crise de la biodiversité a de nombreux autres facteurs, tous anthropiques : pollution, déforestation, surpêche, propagation d’espèces invasives…
Par son activité seule, l’Homme arrive à avoir sur les écosystèmes un impact similaire à celui des forces géophysiques. Cette influence de l’être humain sur la géologie et les écosystèmes est devenue significative à l’échelle de l’histoire de la Terre. Les scientifiques ont ainsi défini une nouvelle époque géologique qui succéderait à l’Holocène actuel : l’Anthropocène ou “ère de l’être humain”.
L’activité humaine a donc un impact similaire sur la biodiversité à un astéroïde de 10 km et une province volcanique. De quoi envisager sérieusement une remise en question du système de production capitaliste, non ?