Depuis le début de la saison de Ligue 2 fin août, les associations de supporters et les groupes d’ultra luttent contre la financiarisation du football. À la fois dans la gestion des dates de matchs et sur la question des abonnements télévisuels qui tuent le football populaire.
Pour eux, « c’est contre un football uniformisé et traité comme un spectacle qu’il faut lutter ».
« Éteins ta télé, rallume ta passion ! »
Si la Ligue 2 de football a toujours vécu dans l’ombre de sa grande sœur, la Ligue 1, au niveau national, c’est bien elle qui revendique le plus un droit à l’existence en dehors du marché international.
La gestion à l’échelle européenne d’équipes de petite ou moyenne taille a engendré des nécessités de financement totalement différentes de celles auxquels ces stades de plus petite taille ont du mal à faire face. Les droits télévisés représentent désormais entre 40 et 50 % des revenus des équipes de Ligue 2 notamment depuis l’arrivée des services de diffusion comme BeIN Sports ou Mediapro (avant son échec en 2020) dans les années 2000 à 2010. Ce sont à présent ces diffuseurs qui pèsent le plus dans l’équilibre économique de la Ligue 2, ils en profitent donc pour imposer leurs conditions au déroulement de la saison.
L’exemple actuel est sûrement le plus frappant, lorsque la Ligue de Football Professionnel (LFP) souhaite revoir la répartition des droits TV avec BeIN Sports, ce dernier fait pression pour modifier le calendrier, notamment pour disputer des matchs le lundi soir. L’association Nationale des Supporters (ANS) s’oppose fortement à ces matchs qui ne permettent pas facilement l’accès aux matchs pour les travailleurs, ni de participer facilement aux déplacements.
Le football se trouve à une croisée des chemins entre la culture du stade, bâtie sur le sport comme loisir et plaisir en dehors des horaires du travail, et culture de la diffusion, dont l’objectif affiché est d’inféoder le sport à une logique capitaliste.
Si on veut apprécier le sport et supporter son équipe, il est important de pointer du doigt ceux qui souhaitent faire d’un sport et d’une culture populaire un objet de business capitaliste lissé, sans âme et sans supporters.
Le planning des journées n’est qu’une facette de l’attaque que subit le foot
Les services de visionnage à la demande (VOD) existent pour permettre de voir les matchs si on ne peut pas / ne souhaite pas se rendre au stade. Mais ces services-là ne soutiennent pas les clubs de la même manière que des places ou des abonnements en tribune, voir pas du tout.
Si les ventes directes au stade sont une recette importante pour les équipes, elles permettent surtout de financer directement les équipements que les supporters utilisent, sans contrepartie ou du moins sans chantage vis-à-vis du déroulé de la saison, ce qu’a fait BeIN Sports.
On ne peut pas considérer que l’expérience du stade et l’authenticité qu’elle représente dans le soutien à son équipe soit comparable à un paiement à des services qui commercialisent le foot et asservissent les clubs à des intérêts capitalistes.
Regarder un match en VOD ou à la télé peut sembler pratique, mais c’est rarement un choix plus économique que la tribune. En tout cas ce n’est pas le cas pour la Ligue 2. Au bon sens économique de ne pas donner 19 €/mois à Amazon, s’ajoute la célébration d’une passion collective, d’une culture du football populaire qui résiste.
Préserver l’équilibre entre un football compétitif et attractif, c’est cela aussi le stade. L’attractivité de l’appartenance à une communauté de supporters plutôt qu’un plaisir solitaire qui ouvre aussi parfois la voie au pari sportif en tant qu’activité spéculative et potentiellement dangereuse.