L’apprentissage des présidentielles

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L’apprentissage des présidentielles

A un mois du premier tour de l’élection présidentielle, les candidats, après de longs silences pour certains, commencent à dévoiler leur programme.

L’apprentissage de l’exploitation

François Fillon (Les Républicains) est celui qui développe le plus son projet pour l’apprentissage, ou plutôt son « traitement de choc ». Le candidat de la droite développe l’idée que l’apprentissage doit devenir la voie principale d’orientation et que celle-ci doit être placé sous le contrôle (pédagogique et financier) des entreprises, en leur permettant par exemple de créer leur propre CFA en ponctionnant les financements des CFA déjà existants (taxe d’apprentissage). Il propose d’assouplir les règles de sécurité des apprentis mineurs en les alignant sur celles des salariés afin qu’ils puissent travailler après 22h ou le dimanche, de réduire le temps passé au centre de formation de 50% du temps à 30% et de sortir les 1.500 lycées professionnels de l’Éducation Nationale.

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L’apprentissage oublié?

Pour Benoît Hamon du Parti Socialiste, l’apprentissage occupe une place très réduite de son court projet, le candidat annonce « Je développerai l’apprentissage ». Difficile sur cette base de savoir ce qu’il pense du sujet. Cependant lors des primaires du PS il avait exprimé son souhait de voir les universités et les écoles prendre une place plus importante dans la formation continue.

L’apprentissage d’un autre temps

Marine Le Pen (Front National) présente une approche singulière de l’apprentissage qui pour elle permet de former uniquement des travailleurs manuels et des « vrais emplois », les apprentis du secteur tertiaire, qui représentent plus de 50% des apprentis, apprécieront . Elle développe des propositions similaires à celles de François Fillon pour l’apprentissage. Elle souhaite elle aussi subordonner totalement l’apprentissage aux branches professionnelles et déshabiller une partie des financements des CFA au profit des entreprises. Enfin elle propose de rendre l’apprentissage possible dès 14 ans, supprimant ainsi la scolarité obligatoire jusqu’à 16 ans (en vigueur depuis 1959). Ici c’est tout simplement un retour au temps des arpètes d’avant-guerre qui est proposé.

L’apprentissage méconnu

Emmanuel Macron (En Marche) propose tout d’abord de créer un ERASMUS de l’apprentissage, malheureusement le dispositif existe déjà, une proposition qui laisse songeur sur la connaissance du monde du travail de l’ancien banquier de chez Rothschild. Tout comme Le Pen est Fillon il souhaite que les branches professionnelles puissent contrôler les formations en  décidant des programmes et de l’organisation de la formation.

Un autre vision de l’apprentissage

Jean-Luc Mélenchon (France Insoumise et soutenu par le PCF) développe une autre approche de l’apprentissage en le liant à la volonté de redonner une autonomie à la jeunesse. Il propose tout d’abord d’unifier la formation continue en l’intégrant au service public et en développant l’enseignement professionnel public (ces 1.500 lycées dont Fillon veut se débarrasser) et de permettre à chaque jeune de choisir sa voie, apprentissage ou non, en créant un service public de l’orientation, revendication portée depuis de nombreuses années par les différentes organisations de jeunesse. L’apprentissage apparaît dans son programme comme l’une des solutions permettant à chaque jeune d’accéder à l’autonomie, bien qu’ils conçoivent les limites du dispositif en parlant de « solution partielle et précaire ».

Deux visions qui s’affrontent

L’approche des candidats de la question de l’apprentissage permet de distinguer deux visions qui s’opposent et qui laissent à voir une certaine approche du travail de manière plus générale. D’un côté une conception très libérale, portée par Macron, Fillon et Le Pen, dans la continuité des dernières décennies où la solution miracle contre le chômage et la misère serait la subordination maximale à l’entreprise et la formation d’une main d’œuvre déconnecté de l’utilité citoyenne et sociale du travail, afin de répondre aux stricts besoins de profits des entreprises.

D’un autre côté une vision du travail et de la formation comme moteur de la société et outil d’émancipation pour tous portée par Jean-Luc Mélenchon où l’humain, son éducation et sa dignité, sont placés au cœur de la réflexion. Quant à Benoît Hamon il préfère se désengager totalement du sujet en se limitant à une petite phrase incantatoire qui résume assez bien la faiblesse générale de son projet et le flou qui l’entoure, une manière peut être de masquer sa difficulté à exister en tant que candidat social-démocrate héritier d’un quinquennat où en tant que ministre de l’éducation il n’a jamais su saisir les enjeux de l’apprentissage et les aspirations des apprentis à moins de précarité.

 


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