L’Insee a dévoilé mardi son nouveau panorama de l’agriculture française. Cette étude accablante met notamment en lumière l’extrême paupérisation d’une partie des agriculteurs, alors que ne se sont jamais autant développées les grandes structures de l’agrobusiness.
16 % des agriculteurs vivent sous le seuil de pauvreté
Si le niveau de vie médian des agriculteurs est très légèrement supérieur à celui de la population générale, leurs revenus restent extrêmement hétérogènes.
Alors que les 10 % des agriculteurs les plus riches vivent avec plus de 44 600 euros par an, 10 % des agriculteurs doivent se contenter de moins de 10 900 euros de revenus chaque année.
Au total, ce sont près de 16 % des agriculteurs qui vivraient en dessous du seuil de pauvreté, contre 14 % de la population générale et surtout 7,4 % des actifs en emploi.
La pauvreté n’affecte pas de la même manière les différents types de production agricole. Si les maraîchers, les horticulteurs et les éleveurs sont les plus touchés, avec un taux de pauvreté allant de 20 à 25 %, ce sont “seulement” 11,5 % des viticulteurs qui vivent sous le seuil de pauvreté, taux qui reste nettement supérieur à celui de la population active en emploi.
Une hyperconcentration de la production et de la richesse, au profit d’une grande bourgeoisie paysanne
Bien que le nombre d’exploitations ait chuté de 41 % en vingt ans, la France reste le premier producteur agricole européen. Avec une valeur de 88,2 milliards d’euros, la production française représentait 18 % du total de l’UE en 2022.
Cela s’explique en partie par une augmentation moyenne de près de 64 % de la surface des exploitations sur la même période, sans jamais n’avoir profité aux petits producteurs.
En réalité, la production comme la richesse sont concentrées entre les mains de très grands propriétaires, au détriment des ouvriers agricoles et de la petite bourgeoisie paysanne. Moins de 5 % des exploitations regroupent près du quart des surfaces agricoles et font travailler 25 % de la main d’œuvre.
Un système à bout de souffle
La pauvreté des agriculteurs est corrélée à la taille de leurs parcelles. Ce système disparate ne profite en finalité qu’à une poignée d’agro-industriels, ce qui est renforcé par le libre-échange et le marché unique.
Si l’essentiel des revendications médiatisées du monde agricole se limitent à la question des normes environnementales et à une réforme de la PAC, la piste d’une redistribution des terres semble en réalité tenir du bon sens dans le cadre de l’avènement d’une perspective agricole profitable pour toutes et tous, du producteur à nos assiettes.