En dégelant le corps électoral en Kanaky / Nouvelle-Calédonie, le gouvernement provoque le peuple kanak en donnant le droit de vote aux Français récemment installés. La France avait pourtant réglé le débat sur la colonisation au siècle dernier en accordant leur souveraineté aux peuples jadis colonisés. Emmanuel Macron, tout jeune président de la République, parlait directement de “crime contre l’humanité” et de “barbarie” en évoquant la colonisation.
Alors que même l’Organisation des Nations-unis reconnaît la Kanaky comme un territoire à décoloniser depuis longtemps, la France joue un jeu très dangereux. Comment interpréter ces annonces autrement que comme une énième insulte ? Emmanuel Macron était pourtant prévenu. Le maintien coûte que coûte du troisième référendum pendant la pandémie de Covid-19 avait été un affront. Le référendum a été boycotté par les indépendantistes.
Il y a 30 ans, un processus de décolonisation a été entamé entre les deux parties, et entériné dans l’accord dit de Nouméa. La France vient, avec ses gros sabots, de le piétiner. Le gouvernement a par la même occasion embrasé le peuple kanak qui se mobilise avec force depuis. S’il voulait mettre le feu aux poudres, le gouvernement ne s’en serait pas pris différemment. Le rapporteur du projet de loi constitutionnelle pour modifier le corps électoral est un député connu pour ses positions anti-indépendantistes, Nicolas Metzdorf.
Le gouvernement s’assoit sur l’histoire et les leçons du passé. En 1972, le gaulliste Pierre Messmer indiquait déjà, toute honte bue, qu’il fallait permettre aux Français d’habiter en Nouvelle-Calédonie pour petit à petit changer le corps électoral et noyer les volontés indépendantistes des kanaks. Les provocations de Paris ont déjà fait couler trop de sang sur la Caillou. Le gouvernement doit revoir sa copie avant que de nouveaux drames ne se produisent. Les revendications kanaks sont légitimes. La France doit être à la hauteur de l’Histoire.