Microplastiques : gros problèmes en perspective

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Microplastiques : gros problèmes en perspective

Les nouvelles ne sont pas bonnes. Que ce soit au fond des océans, au sommet des montagnes, à la campagne, dans les villes, chez les riches ou chez les pauvres, le plastique est partout. 

On connaît bien sûr les macroplastiques, ceux que l’on peut voir à l’œil nu et qui sont omniprésents dans notre quotidien. Mais le principal danger vient des microplastiques, issus de la dégradation de ces macroplastiques ou des résidus industriels. Ces derniers ont un impact encore mal connu du fait de la nouveauté du problème. Mais la globalité de l’enjeu nous pousse à réagir vite et efficacement. 

L’environnement impacté sans exception 

Les études scientifiques se multiplient, mais l’impact des microplastiques sur les écosystèmes est documenté inégalement. La pollution océanique est plutôt bien connue (on estime que 90 % des plastiques retrouvés dans la mer sont des microplastiques), mais la contamination des sols, notamment des sols agricoles, est loin d’être appréciée à sa juste mesure. Cela crée des trous dans la raquette quant à la lutte contre les microplastiques et la mise en place de mesures sanitaires et environnementales. Ce qui est certain, c’est que la totalité des milieux naturels est impactée par cette pollution. Dans une étude parue en décembre 2024, l’Ademe (agence de la transition écologique) révèle que plus des ¾ des échantillons prélevés dans un vaste panel de sols, contiennent des microplastiques, avec en moyenne 15 particules de plastiques par Kg de matière sèche. Cette étude révèle une pollution quasi systématique aux microplastiques dans les sols français, dont les sols à vocation agricole. 

La raison principale de cette contamination est la dégradation des macroplastiques par des facteurs environnementaux comme les UV, l’eau ou encore la lente oxydation due au contact avec l’air. Mais elle est également due à tous les matériaux plastiques soumis à une usure comme les pneus ou les divers équipements automobiles, sans compter les emballages à usage unique. On comprend alors l’étendue du problème. Le plastique est omniprésent dans nos quotidiens, que ce soit dans les maisons, en ville ou le long des routes. Les sources de particules de plastique sont presque infinies. Ces microplastiques vont alors être véhiculés par l’eau au travers des différents écosystèmes en s’infiltrant dans les sols avant de rejoindre les cours d’eau et de polluer les mers et les océans. D’après le WWF, ce seraient 104 millions de tonnes de plastique qui risquent de s’infiltrer dans l’environnement d’ici à 2030 si rien n’est fait. On se retrouve alors face à une contamination massive et incontrôlable dont on ignore encore presque tout, et notamment les impacts sur la biodiversité et sur la santé humaine. 

Un enjeu sanitaire encore mal connu 

L’impact sanitaire de la contamination aux microplastiques sur le corps humain est encore mal documenté. De nombreuses études sont faites, mais la méthodologie appliquée aux protocoles scientifiques n’est pas uniformisée. Cela induit de grosses différences de résultats entre les études et donc des difficultés à évaluer clairement le niveau des contaminations à l’échelle régionale comme mondiale.

Une étude dont les résultats ont été publiés dans le Guardian révèle que 80 % des personnes participantes à cette étude contiendraient en elles des particules de plastique. Mais l’étude ne porte que sur 22 individus, c’est-à-dire un échantillon qui ne peut être représentatif d’une population. Ce sont donc des chiffres à prendre avec des pincettes.

Toutefois, l’Office Parlementaire d’Évaluation des Choix Scientifiques et Technologiques (OPECST) dresse un bilan plutôt exhaustif de l’impact sanitaire des microplastiques sur l’humain dans un rapport publié en novembre 2024 : Il existe 3 voies d’exposition aux microplastiques : la respiration, l’alimentation et le contact cutané. L’assimilation du plastique se fait principalement par inhalation avec la présence de particules de plastique dans l’air, émise notamment par l’industrie. Mais ces particules peuvent également être ingérées en même temps que des aliments d’origine végétale contaminés via les sols et d’origine animale eux-mêmes intoxiqués par des produits contenant des microplastiques. La contamination des individus va être soit directe, via l’air pollué, soit indirecte avec l’ingestion de produits alimentaires ou d’eau contaminée antérieurement. Il est donc très difficile d’empêcher l’absorption de particules de plastique omniprésentes dans notre environnement.

Les effets sur la santé sont multiples. On sait depuis les années 70 qu’il y a une corrélation entre l’inspiration de particules de plastique et le développement de maladies comme des cancers. Mais les effets de l’ingestion de microplastiques sont bien plus méconnus. De récentes recherches, que le rapport de l’OPECST mentionne, rapportent que l’ingestion de microplastiques perturberait le microbiote intestinal, détruisant certaines bactéries importantes pour la digestion humaine. 

Les nano-plastiques, plus petits que les microparticules, auraient la capacité de traverser la paroi intestinale et seraient transportées par le sang, voire même par les nerfs (toujours d’après l’OPECST). Cela permettrait aux particules de plastique de se retrouver jusque dans le cerveau, les reins, les testicules ou le placenta, avec des conséquences encore mal connues. 

Un besoin urgent de prendre des mesures nationales et internationales

Les scientifiques alertent depuis de nombreuses années sur le fait que la situation est déjà dramatique et qu’elle mettra très probablement des milliers d’années à se résorber. La production et l’utilisation inconsidérée de plastique doivent être arrêtées et il est désormais urgent de trouver des alternatives crédibles. 

En cette fin d’année 2024, s’est tenue à Busan, en Corée du Sud, la dernière session de négociation sur un futur potentiel traité sur le plastique. Cependant, les négociations n’ont pas abouti. Alors que de nombreux pays d’Amérique du Sud, d’Afrique et d’Europe étaient favorables à un traité juridiquement contraignant qui avait pour but de réduire la production primaire de plastique, les pays producteurs de pétrole ont refusé toute résolution contraignante pour leur économie.

Des solutions sont pourtant mises en avant par les scientifiques et la communauté internationale : 

  • Mise en place d’un accord mondial contraignant qui doit permettre une réduction massive de la production de plastique et notamment de plastiques à usage unique ;
  • Mesures contraignant les industriels à une transparence vis-à-vis des méthodes de production et des produits utilisés sous peine de lourdes sanctions ; 
  • Mise en place de financements pour la recherche et le développement d’alternatives crédibles au plastique ;
  • Un investissement massif dans la recherche publique pour permettre une meilleure compréhension des dangers sanitaires dus aux microplastiques avec une approche méthodologique internationale. 

Un important travail de sensibilisation pour changer les modes de consommations au sein même des populations doit être fait par les pouvoirs publics en partenariat avec les structures associatives pour permettre une prise de conscience de la situation. 

Il ne peut s’agir que d’une lutte globale qui ne pourra que limiter la casse et qui se fera uniquement via la coopération scientifique et technologique des secteurs privés et publics du monde entier. 


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