Des jeunes ont lancé un podcast sur Youtube lors du deuxième confinement, nous avons discuté avec eux de ce nouveau podcast plutôt original dans le fond comme dans la forme.
Vous avez lancé ce podcast il y a un mois, avec maintenant 4 vidéos. Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous exprimer dans ce format à ce moment-là et comment vous êtes vous réunis autour de ce projet ?
On a lancé le podcast il y a plus d’un mois lors de la journée contre les violences faites aux femmes. Pendant le dernier confinement, on faisait souvent des réunions en visio au Mouvement jeunes communistes et on réfléchissait au maintien du lien entre nous et de notre activité pendant ces mois particuliers. La discussion s’est prolongée avec quelques-uns.
On a eu l’idée d’un podcast culturel, car ce n’est pas vraiment présent dans notre spectre politique sur internet. C’est la volonté de faire de la culture populaire, avec des sujets un peu au second plan dans le champ militant sur internet, notamment les sujets scientifiques, sportifs ou artistiques.
On essaie de traiter toutes sortes de pratiques, les loisirs, les jeux vidéos, etc. Le format podcast s’intègre bien dans la trame du quotidien, on l’écoute en faisant la vaisselle par exemple. Être dans le quotidien permet de se rapprocher le plus possible d’une discussion. Il y a aussi un aspect pratique, on n’exclut a priori de faire de la vidéo, mais le podcast nous a semblé plus simple à produire.
Le nom du podcast est double. “Iskra” (étincelle) semble faire référence à la culture révolutionnaire et “Voix communes” annonce que diverses voix se mêlent dans ce podcast. Pourquoi ces deux noms ?
Iskra fait référence au fameux journal révolutionnaire de Lénine qui était adossé à un journal théorique (Plamya – flamme). On a choisi ce nom pour rappeler la constellation de publications et contenus médias (déjà à l’époque !) autour du spectre politique communiste dans beaucoup de pays.
On voulait faire référence à cette histoire qui nous parle en tant que jeunes convaincus par le communisme, et ça nous permettait de nous interroger sur ce qu’est un contenu médiatique communiste.
De plus, c’était l’imagerie de la flamme, de l’étincelle qui nous a plu. La feu évoque aussi bien l’aspect de lumière dans l’obscurité, telle que peut l’être la connaissance et la science dans cet obscurantisme individualiste du capitalisme actuel, que l’aspect chaleureux d’aller se poser “au coin du feu”, comme on le dit en gimmick à la fin de chaque épisode.
Pour Voix communes, c’était intéressant de marquer la dimension participative et plurielle du podcast, car le podcast n’est pas centré autour d’une personnalité, ni même de plusieurs bien définies, mais il offre des témoignages, des regards, où des contributeurs et contributrices variées peuvent écrire un épisode du podcast ou apporter des idées.
D’ailleurs, on ne connaît pas les voix, elles ont des prénoms, mais on a l’impression que de nouvelles voix peuvent surgir à tout moment dans n’importe quel épisode… C’est plutôt un contre pied par rapport au format standard actuel des vidéos Youtube qui font une grande place à la personnalité de celui ou celle qui porte la chaîne jusque dans les moindres détails de son quotidien et de ses états d’âmes, c’est conscient de votre part ou pas du tout ?
C’est un peu inconscient… On avait envie de faire quelque chose qui nous plaît. On ne s’est pas dit : “ça, ça marche bien, on va essayer de faire pareil”.
Très souvent les podcasts, en langues française ou anglaise, sont assez informels et très peu d’écrits, ce sont des discussions, alors qu’on avait envie de faire quelque chose de très écrit avec du montage, avec une dimension un peu théâtrale, orchestrée, avec des effets audios, mais tout en gardant le côté décontracté du podcast “discussion”.
On veut laisser un format très ouvert, sans le figer dans une identité précise, pour avoir une capacité de réinvention. On se demande : c’est quoi le prochain épisode, c’est qui ? On voulait surprendre avec des sujets sur lesquels on ne nous attend pas. Et donc la pluralité de voix permet ça : surprendre !
On se laisse surprendre et embarquer par la nouveauté. Les échanges les plus intéressants, c’est quand ça grouille, quand il y a beaucoup de monde !
Du coup, qu’est-ce qui se passe dans l’ombre, comment vous préparez les épisodes ?
Les épisodes se créent dans une discussion, on s’appelle, bientôt on espère pouvoir se voir, et on explore plein de thèmes, des questions d’actualité, une chaîne d’éléments connectés qui relient le thème à notre intérêt pour la politique.
Par exemple, pour la pétanque, c’est lié au journal régional communiste La Marseillaise. Pour le krach des Tulipes, on voulait quelque chose qui marque l’imagination et en même temps qui donne l’idée d’une similarité entre les crises économiques. Là c’est une bulle spéculative formée par une fleur somme toute banale. L’idée c’est comment on arrive à enfiler les perles qui relient notre regard politique avec des sujets qui nous interpellent.
Les premiers sujets, et même les types de contenus, sont très divers : l’histoire de l’hymne des femmes, l’analyse du krach des Tulipes, la pétanque… Est-ce qu’il y a une cohérence dans le choix des sujets ou leur traitement, ou est-ce que vous allez volontairement dans plusieurs directions ?
On n’a pas vraiment déroulé une maquette éditoriale avec des thématiques très articulées sur le plan des idées, on n’est pas parti dans une cohérence qui va d’un sujet pour nous amener à un autre sujet.
On s’était demandé si on construisait une articulation, mais l’alternance entre les rubriques, culture, sport, jeux vidéos, économie, etc., pouvait créer un rythme intéressant. On veut des “étincelles” plus que du marbre ou du béton.
Ce n’est pas exclu d’avoir des choses plus articulées ou d’être connectés avec une thématique d’actualité. De toute façon rien n’est exclu ! Il y a plus de cohérence dans la démarche et une grande liberté dans les contenus.
Le premier est un hommage à l’hymne des femmes où vous chantez, pourquoi avoir commencé par ça ?
Il y avait deux choses : l’actualité de la lutte contre les violences faites aux femmes, mais on voulait aussi signifier la dimension de pratique artistique chère aux personnes qui participent au podcast : on peut créer des choses.
Là en l’occurrence, on a chanté. On peut créer des choses, autour du podcast, en lien avec lui : des visuels pour les réseaux sociaux, du contenu audio intégré dans les podcasts. C’est l’idée de signifier une liberté de création, de ton, une démarche participative : on crée, on lit des choses ensemble. Un peu comme un atelier théâtre !
Après, vous avez fait une série d’épisodes de vulgarisation historique et économique, vous allez refaire ce genre de série ?
On veut alterner des formats courts, et des formats plus longs, avec des contenus légers et libres, mais aussi des contenus plus documentés : ça donne l’image de la culture qu’on a.
La culture scientifique est quelque chose d’essentiel. Ne pas parler de sciences ou d’économie, pour un podcast culturel, ce n’est pas possible !
Il y a des choses qui existaient déjà, par exemple la chaîne YouTube “Sur les épaules de Marx” avec des contenus économiques marxistes. Mais on voulait présenter la dimension culturelle de l’économie : comment l’économie marque l’imaginaire et l’histoire. Des phénomènes très concrets peuvent façonner l’imaginaire. On a déjà parlé de refaire des séries longues sur certaines thématiques, de façon approfondie et documentée.
D’accord, et la pétanque ?
La pétanque, c’était très spontané, très rapide dans la composition, un sujet plus léger, fait rapidement, avec des entretiens et témoignages sur le sens qu’a cette pratique pour les joueurs. Ce genre de formats très légers permet de susciter une discussion et des interactions, en tout cas c’est ce qu’on voulait en dehors des questions de statistiques de vues, etc. Quelqu’un pourrait complémenter notre propos avec un aspect du thème qui n’aurait pas été abordé. Les auditeurs pourraient faire des apports, donner leur point de vue, partager leur expérience culturelle : c’est ce qu’on voulait activer du côté du public avec un sujet comme la pétanque.
Ce sera quoi la suite, et qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter ?
En fait, on fonctionne de manière assez “organique”, tout se fait de façon lisse, les choses se font dans l’échange, et donc le prochain sujet va émerger de la discussion ! Ce sera une surprise pour nous aussi ! On a juste hâte de voir le résultat fini, comme à Noël (rires). Quand je faisais du dessin, j’avais parfois l’insatisfaction du résultat final, là on est plutôt surpris du résultat finalement. C’est un peu une revanche sur des conditions de vie que nous avons en tant que jeunes qui laissent peu de temps aux loisirs, à la réflexion… On se dit “j’ai pas le temps” de faire ce genre de choses. C’est assez flippant de s’entendre dire ce genre de choses à notre âge. Dans ces conditions, c’est assez difficile de parvenir à un épanouissement personnel.