Alors que le chantier de Flamanville peine à se terminer et atteint un coût de 12,4 milliards d’euros et que le chantier de l’EPR d’Hinkley Point en Angleterre fait face à de grandes difficultés financières, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire ainsi que la ministre de la Transition écologique Élisabeth Borne ont demandé au président d’EDF d’étudier la perspective de la construction de six réacteurs supplémentaires de nouvelle génération.
L’état face à la nécessité de construire des réacteurs nucléaires.
Le chantier sans fin de l’EPR de Flamanville a montré une faille de la maîtrise de cette technologie par EDF. Le démarrage de Flamanville est décalé à 2023 et son coût de construction est porté à 12,4 milliards d’euros au lieu des 3,5 milliards d’euros initiaux. Se pose alors la question évidente : comment dans ces conditions le gouvernement peut-il réclamer la construction de 6 réacteurs nucléaires ?
Tout d’abord, le vieillissement du parc nucléaire français implique son renouvellement et face à l’objectif de baisse des émissions de gaz à effet de serre, il apparaît difficile de se passer de cette technologie sur le long terme. Pour la fédération mines-énergie de la CGT, il ne faut pas perdre de temps dans la construction de ces réacteurs afin d’éviter le maintien des anciens réacteurs au-delà des dates limites.
Ensuite, la filière nucléaire estime que les coûts de fabrication vont baisser au fur et à mesure de l’expérience qui sera dégagée du premier chantier.
Cette commande d’EPR est donc un moyen de faire face à une fermeture en cascade de nombreux réacteurs qui ne pourront plus être prolongés. L’ASN a également mis en garde EDF face au risque de perte d’expérience et d’affaiblissement des compétences, c’est pourquoi les différents chantiers devront avoir lieu à des dates rapprochées.
Un manque de compétence de la filière nucléaire française
Face aux problèmes rencontrés sur les chantiers de Flamanville et d’Hinkley Point, il reste encore la question de la capacité des industriels, EDF et Alstom à fournir ces 6 réacteurs EPR avec le budget prévu. D’une part, l’ampleur de l’investissement qui se chiffre à une dizaine de milliards d’euros est hors de portée pour EDF.
Et d’autre part, les compétences technologiques ne sont pas encore au rendez-vous. Il faudra donc exiger du gouvernement une transparence sur les dispositions qui seront prises pour s’assurer d’un coût minimal pour les abonné·e·s.
Les réacteurs de 4e génération et la question des déchets
Alors que le gouvernement commande à EDF ces six réacteurs EPR, il a dans le même temps stoppé la recherche sur les réacteurs de 4e génération. Dans cette programmation de chantiers de réacteurs nucléaires, une problématique reste en suspens : la question des déchets nucléaires. Fin août 2019, nous apprenions que la France abandonnait après plus de 10 années de recherches les expérimentations sur le réacteur de 4e génération nommé Astrid.
Ce prototype avait pour objectif de montrer qu’il était possible d’user de la technologie de réacteur nucléaire de 4e génération à un niveau industriel. Il avait également cet objectif ambitieux du recyclage des déchets nucléaires et d’une augmentation conséquente des rendements afin d’utiliser considérablement moins de combustible.
La maîtrise par la France de ce type de technologie aurait également pu permettre à long terme d’avoir la maîtrise d’un domaine technologique et ainsi d’éviter à EDF de faire face à des fiascos industriels comme ceux survenus sur les deux chantiers d’EPR.