La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) est un document de planification de la stratégie énergétique nationale. Derrière ces termes un peu occultes, de grands enjeux se dévoilent.
Ces dernières semaines, le plan visant à guider les orientations énergétiques de la France pour les dix prochaines années a été mis en débat, notamment à l’Assemblée nationale. Que faut-il en retenir ?
Adoption de la “PPE 3” : quels enjeux ?
La programmation pluriannuelle de l’énergie a été créée en 2015 afin de mettre la France sur les rails de la neutralité carbone en 2050. Ce document, modifié tous les cinq ans, veut piloter l’action énergétique nationale sur dix ans.
La PPE est un des trois plans permettant d’accomplir la “stratégie française pour l’énergie et le climat”. On parle en 2025 de la “PPE 3”, la troisième à être adoptée depuis 2015.
Le Gouvernement, par la voix du ministre de l’Industrie Marc Ferracci, présente la PPE 3 comme permettant de se doter d’une énergie “décarbonée, compétitive et souveraine”. Plusieurs objectifs sont annoncés en introduction de la grande concertation qui était organisée en début d’année préalablement à l’adoption de la PPE.
Le premier est celui de la réduction de nos consommations énergétiques. L’argument est le suivant : “l’énergie la moins chère est celle que l’on ne consomme pas”. Dans un discours ambiant autour de la “sobriété”, les travailleurs en situation de précarité énergétique apprécieront le constat. Cet objectif est toutefois assorti d’une référence à l’électrification de notre mix, qui permet effectivement de rendre plus efficace la consommation énergétique, et donc de la réduire.
Le second cap est la fin de l’utilisation du charbon en 2027, et la sortie de la dépendance aux énergies fossiles en 2050, pour la production d’électricité. En effet, le sous-investissement latent dans le nucléaire et dans les énergies renouvelables a conduit la France, ces dernières années, à s’appuyer sur des énergies fortement carbonées pour produire de l’électricité à la marge. À terme, cette solution est inconcevable.
Enfin, le troisième défi est “l’augmentation de la production de l’ensemble des vecteurs énergétiques décarbonés”. Il faut entendre par là le développement massif de la production électrique, mais aussi celui d’énergies comme l’hydrogène. La neutralité carbone en 2050 ne peut en effet être atteinte qu’en décarbonant nos énergies.
Et concrètement, que prévoit le Gouvernement ?
Afin d’atteindre les objectifs énoncés et de se doter de cette fameuse énergie décarbonée, compétitive et souveraine, le Gouvernement présente des orientations qui ont soulevé un certain nombre de critiques.
La trajectoire principale est la réduction progressive des énergies fossiles dans la consommation énergétique finale en France. Cela se concrétise par un passage de 60 % en 2023 à 30 % en 2035.
En parallèle, la part d’électricité dans cette consommation doit évidemment augmenter. Néanmoins, une augmentation considérable de la part de la biomasse est à prévoir. Si cette dernière est une alternative renouvelable aux énergies fossiles, son usage ne doit pas être abusif. En effet, les ressources en biomasse sont limitées et doivent être privilégiées pour la constitution, notamment, de puits de carbone indispensables à la neutralité en 2050.
Contrairement à la PPE 2, celle en cours de parution prévoit une nouvelle impulsion pour le nucléaire. Cela fait suite au “discours de Belfort” prononcé par Emmanuel Macron en 2022, souhaitant la relance de l’atome aux premiers horizons 2035. Comme l’Avant Garde y a souvent appelé, il faut désormais transformer les paroles en actes. Les conditions en matière d’emplois et de technologies ne sont pas optimales, à ce jour, pour atteindre les ambitions publicitaires du chef de l’État. Plus de moyens doivent être investis en ce sens.
Pourquoi la PPE 3 est-elle critiquée ?
Les partis politiques comme les acteurs du secteur de l’énergie ont pu adresser leurs reproches à cette programmation pluriannuelle 2025-2035.
Selon le Parti communiste français, les objectifs sont en deçà du nécessaire pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Les cibles en matière d’électrification de la production et des usages seraient insuffisantes à l’horizon 2035.
Surtout, les conditions politiques actuelles ne sont pas idéales pour l’accomplissement de ce programme. Il manque à la France un grand service public de l’énergie, sous l’égide d’EDF, indispensable pour atteindre ces objectifs. L’éclatement des opérateurs du secteur énergétique, voulue par l’Union européenne, est une entrave à l’obtention d’une énergie propre, abordable et indépendante.Enfin, une fois n’est pas coutume, le Premier ministre François Bayrou a décidé de ne pas soumettre l’adoption de la PPE 3 à un vote du Parlement. Un plan aussi important n’est a priori pas digne du processus démocratique parlementaire, et n’a fait l’objet, pour l’instant, que d’un débat sans vote à l’Assemblée nationale. La publication d’un décret est donc attendue.