Peu connu du grand public et des amphithéâtres, le processus de Bologne représente pourtant un élément important du système universitaire français et européen.
De la Sorbonne à Bologne
Le contexte européen des années 1990 est marqué par la stratégie de Lisbonne, feuille de route libérale de toutes les politiques européennes. On veut harmoniser l’espace européen en le rendant lisible, coopératif et compétitif.
Le processus de Bologne a d’abord été initié par 4 pays lors de la déclaration de la Sorbonne en 1998 : la France, l’Allemagne, l’Italie et le Royaume-Uni. Un an plus tard, il a mobilisé 29 pays signataires à Bologne. Actuellement, ce sont 48 États qui y sont impliqués.
Les fondamentaux du processus de Bologne
Les fondements du processus de Bologne comprennent l’adoption du système en trois cycles (licence, master et doctorat), l’utilisation des crédits ECTS, la collaboration pour évaluer la qualité, la mise en place de cadres nationaux de qualification et le développement de la mobilité universitaire.
L’harmonisation de l’Espace Européen de l’Enseignement Supérieur a produit un espace à la fois coopératif et compétitif. On a un réseau européen d’agence de qualité qui a pour but de comparer et de garantir une qualité sur la base de références partagées. De même que les cadres de formations, et les niveaux de certifications qui font le lien entre le milieu de qualification et le milieu professionnel. Ainsi, on a une culture de la qualité avec la définition d’objectifs communs et une simplification de mobilité de l’information entre chercheurs.
Un outil mal utilisé
La question d’un organisme au service de l’ordre libéral compétitif doit se poser. Sommes-nous face à une marchandisation du savoir ?
En mai 2001, le communiqué de la conférence des ministres de l’Enseignement supérieur réuni à Prague laissait entendre que « Dans l’Europe de demain, fondée sur une société et une économie de la connaissance, se doter d’une stratégie en matière d’éducation et de formation tout au long de la vie s’avère nécessaire pour répondre aux défis que constitue la compétitivité économique ». Rien que ça.
Les réformes ont pour objectif de faciliter l’exploitation par les entreprises privées des connaissances générées par les institutions publiques. C’est d’ailleurs en ce sens que Business Europe est membre consultatif du processus.
Sous ses airs de simple association, il s’agit en réalité d’un puissant lobby patronal qui défend les intérêts des employeurs d’entreprises privées auprès de l’Union européenne. Spoiler alert : le MEDEF en fait partie.
Le processus a été mis en place de différentes manières et à différents moments selon les pays européens. En termes d’ultra-libéralisation de l’Enseignement supérieur, le Royaume-Uni, malgré le Brexit, reste le bon élève du processus de Bologne. En moyenne, les étudiants accumulent une dette de 35 000 livres à la fin de leurs études.
Actuellement, certains cours en Philosophie, Histoire et Sociologie sont supprimés, car les milieux économiques veulent transformer ces disciplines en outils d’adaptation plutôt qu’en espaces de critique.
Un processus de Bologne au service du monde universitaire est-il possible ?
Cet outil est mal utilisé, c’est certain, mais y a-t-il pour autant des solutions pour le changer ? Léon Deffontaines, tête de liste PCF pour les élections européennes, propose plusieurs changements à très court terme. Prenons ne serait-ce que deux éléments de son programme sur la question de la démocratie, de la recherche et du financement. Le candidat communiste souhaite instaurer au niveau européen des « instances directives se composant des représentant.es de toutes les catégories des personnels de recherche » pour mieux cibler les problèmes et contrer les influences patronales. Il propose aussi une nouvelle gestion des financements, libérés de l’injonction de rentabilité.