Dans nombre de départements en France, les Centres LGBTI militent et travaillent pour l’avancée des droits des personnes LGBTI sur l’ensemble du territoire. Un combat que beaucoup considèrent comme dépassé depuis la loi autorisant le mariage pour tous en 2013, mais qui est loin de l’être.
À l’occasion de la semaine des fiertés du MJCF, Avant-Garde est allé à la rencontre de Christian Michot, militant et co-président du Centre LGBTI du Poitou, pour connaître le travail local d’un Centre LGBT.
Depuis quand es-tu engagé pour les droits LGBTI, et depuis combien de temps dans le Centre LGBTI de la Vienne ?
J’ai d’abord adhéré à l’association David et Jonathan. J’y ai adhéré il y a 15 ans parce que cette association me permettait de concilier mon engagement dans la lutte LGBTI et ma foi chrétienne. Ensuite nous avons créé le Centre LGBTI du Poitou où je me suis investi.
À quelle date a été créé le Centre ? Et quels sont son travail, ses missions, les initiatives qui sont organisées ?
C’est en 2012 pendant le combat pour le mariage pour tous, avec tous ces mouvements de violence envers la communauté LGBTI que l’idée est venue d’unir toutes les associations LGBTI du Poitou en une structure commune et c’est comme ça qu’en 2018, le centre se créer officiellement. Notre première initiative fut de créer les « apéros arc-en-ciel », qui était, et sont toujours, des moments forts de rencontres et d’échanges à propos des questions LGBTI.
Nos missions sont les suivantes : porter les revendications des personnes LGBTI autour de l’égalité de droit, informer, porter une parole publique et être un lieu d’écoute et d’accueil pour les personnes LGBTI. Pour ce faire nous organisons beaucoup d’initiatives tout le long de l’année. Il y a évidemment la marche des fiertés chaque année, qui fédère des centaines de personnes dans les rues de Poitiers. Mais aussi notre festival des fiertés qui, pendant la semaine des fiertés, nous permet d’organiser nombre d’événements autour des questions LGBTI pour informer, former et échanger autour des questions LGBTI.
Quelles sont vos revendications à l’échelle locale (et à l’échelle nationale) ?
Nos revendications tournent surtout autour des questions de l’homophobie ordinaire. Car partout dans la rue ou bien sur les réseaux sociaux l’homophobie est présente. Nous revendiquons donc une réelle éducation à la sexualité et à la vie affective qui inclut les questions LGBTI. Ensuite, nous revendiquons aussi particulièrement la formation des assistantes sociales aux causes LGBTI, car sans formation, nombre de couples lesbiens ou gay se voient refuser une adoption sur la base de préjugés homophobes.
Comment vous organisez-vous ?
Le Centre LGBTI du Poitou est composé de personnes physiques bénévoles et de 5 associations poitevines militant sur les questions LGBT. Les associations sont très singulières les unes des autres. Par exemple, le centre est aussi bien composé de Rando’s Poitou, association LGBT de randonnée pédestre, que de l’association Transendance, qui elle, travaille sur les questions de genre et de sexualité. L’association est indépendante de toute organisation politique, syndicale, religieuse
quelle sont les actions mises en place pour lutter contre les LGBTI phobies ?
D’abord, nous essayons d’être les plus attentifs possible sur les réseaux pour pouvoir dénoncer tout post ou publicité LGBTIphobe.
Ensuite, nous essayons d’être le plus visibles possible pour que les personnes LGBTI puissent nous trouver facilement en cas de problème, car ces actes sont humiliants et dégradants et touchent au plus profond de notre intimité. Pour nous, c’est pour cela que notre présence en cas d’agression, de harcèlement… est primordiale : cette question de l’intimité elle ne peut pas se dire à n’importe qui. Pour ce faire nous sommes beaucoup en lien avec SOS homophobie.
Lutter contre les actes LGBTIphobie c’est aussi faire comprendre aux gens que les agressions homophobes ce n’est pas loin de chez nous, c’est partout.
Peux-tu m’en dire plus sur le festival Lesbienne Bi Trans Intersexe du Poitou que vous organisez depuis 2013 ?
Le plus gros de notre visibilité se fait sur la semaine des fiertés. Ce festival est donc l’occasion pour nous d’être visible et fière sur tout le long de la semaine par l’organisation d’événement divers et varié. La dimension historique et culturelle de cette semaine nous est très chère. Que ce soit par la diffusion de films, l’organisation de conférence ou encore de soirées de soutien, nous voulons former les gens sur l’injustice et l’inégalité de traitement que nous subissons. De plus, il est important pour nous de faire connaître l’histoire du mouvement LGBTI, qui a fêté ses 50 ans l’année dernière avec l’anniversaire des mouvements de Wall Stone.
Pour ce qui est de la marche des fiertés à Poitiers, je suis toujours impressionné de voir des centaines de jeunes qui portent les drapeaux LGBT. Normalement toujours exclu de l’espace public, ce jour-là nous occupons l’espace et on sort du placard.
Avez-vous constaté une évolution des mentalités ou des violences en ce qui concerne les personnes LGBTI ?
Sur cette question là je suis assez mitigé. En effet je pense que dans le regard commun que portent les gens il y a une meilleure acceptation du fait LGBT. De plus, il y a eu des avancées y compris législative qui ont, dans un certain sens, fait évoluer les mentalités. Mais c’est encore profondément ancré dans la culture. La LGBTphobie quotidienne est encore très présente. Par exemple l’insulte « sale pd » est entrée dans le langage courant sans que personne ne conscientise qu’elle stigmatise une communauté. Ensuite, les agressions et harcèlements sont en hausse sur tout le territoire, et le Poitou-Charentes n’en fait pas exception.
Aussi, quand nous accompagnons des personnes dans leur transition, nous observons que cela reste encore une très grosse épreuve pour les parents d’accepter leur enfant tel qu’il ou elle est. Le rejet est très puissant, et d’autant plus dans certain milieu moins au fait sur la question. D’ailleurs je n’oublie pas qu’au sein même de mon parti, le PCF, jusque dans les années 70, il ne faisait pas bon d’être homosexuel.
Prenez-vous part à la lutte LGBTI autrement que pendant la semaine des fiertés ?
Oui bien sûr, tout au long de l’année en fonction de l’actualité nationale et internationale. Pour nous, la Lutte LGBTI est une lutte éminemment politique. Nous étions donc mobilisés au moment des manifestations pour la PMA pour tou·te·s par exemple, mais aussi pour la dépénalisation de l’homosexualité en Turquie.Cependant, nous savons que cette lutte sera longue et rude, car cette conscientisation politique là demande du temps. Le chemin entre la conscience que « je suis discriminée » et le moment où je commence à lutter est parfois long. Mais je pense que les choses évoluent parce qu’il y a des luttes, et la lutte LGBT doit continuer.