À deux reprises, les 15 et 25 janvier, une marée noire a touché les côtes péruviennes au nord de Lima. En cause, une fuite de pétrole originaire des activités de la compagnie pétrolière espagnole Repsol.
La première fuite de pétrole s’est produite pendant le déchargement d’un tanker dans la raffinerie de La Pampilla, propriété du groupe pétrolier. La deuxième fuite s’est produite alors même que l’entreprise effectuait des travaux sur un oléoduc sous-marin, pour tenter d’éclairer les causes de la catastrophe précédente.
Un impact irréversible sur la biodiversité
Cet événement représente une réelle catastrophe environnementale, dont l’impact sur la biodiversité se fera ressentir sur plusieurs années.
Aujourd’hui, on estime le nombre de barils de pétrole brut déversés dans l’océan pacifique à 12 000 barils. Les autorités péruviennes avaient au départ avancé le nombre de 6000 barils, avant de le réévaluer. La marée de pétrole a recouvert tout l’écosystème et a entraîné des pertes irréparables.
Selon le gouvernement, la nappe noire aurait souillé plus de 180 hectares de littoral et 713 hectares d’espaces maritimes. Cela a entraîné la mort de milliers de poissons et d’oiseaux, dans une région autrefois emblématique pour la diversité de ses espèces marines.
Outre une vingtaine de plages polluées, cette fuite de pétrole met en péril l’équilibre naturel de deux aires naturelles protégées : la Réserve nationale du système des îles et des îlots et la Zone protégée d’Ancon.
Un désastre social à plusieurs égards
Cet événement représente également un désastre social, puisque des centaines de milliers de pêcheurs artisanaux se trouvent empêchés d’exercer.
Plusieurs mobilisations ont ainsi été organisées pour dénoncer les conséquences de la marée noire sur l’emploi. Muni.e.s de leurs filets de pêches et de cadavres d’oiseaux couverts de pétrole, les pêcheurs et les pêcheuses se sont notamment rassemblé.e.s devant la raffinerie La Pampilla, pour dénoncer la responsabilité de la compagnie pétrolière Repsol dans cette catastrophe.
De plus, les conditions de travail sont très difficiles pour les ouvriers et les ouvrières chargé.e.s de récupérer les milliers de barils déversés dans l’océan pacifique. Ceux-ci et celles-ci travaillent sous la chaleur accablante de l’été austral, et sous les effluves de gaz insupportables, qui s’échappent des hydrocarbures stagnants.
Le travailleur, Pedro Guzman, déclare à l’AFP « C’est dur, c’est toxique, cela brûle le visage ».
On compte plus d’un millier de travailleurs et de travailleuses qui, simplement muni.e.s de pelles et de grandes éponges pour ramasser le pétrole dans de grands sacs plastiques et des bidons, sont chargé.e.s des « travaux de récupération et d’assainissement » de la zone polluée par les activités de la société Repsol.
Repsol coupable des marées noires
L’entreprise Repsol nie toute responsabilité dans la catastrophe. Lors de la première fuite de pétrole, la société accusait la forte houle présente dans le Pacifique, à la suite d’une puissante éruption volcanique aux îles Tonga, d’avoir provoqué la marée noire.
Suite à la seconde fuite de pétrole, la société s’est contentée de nier toute nouvelle marée noire en mettant « en garde la population sur la circulation de fausses informations ». Quelques heures avant que les autorités péruviennes confirment la version des militaires qui ont alerté de la présence d’une nouvelle nappe huileuse à proximité de la raffinerie.
La justice péruvienne a ainsi interdit à quatre responsables du groupe Repsol, dont son président au Pérou, l’espagnol Jaime Fernandez-Cuesta Luca de Tena, de sortir du pays pendant les dix-huit mois prochains. Le temps de poursuivre l’enquête, ouverte par le procureur détaché auprès du ministère de l’Environnement, Julio Cesar Guzman.
Jaime Fernandez-Cuesta Luca de Tena y sera jugé pour délit de « pollution de l’environnement aggravée » à l’encontre de l’État péruvien, passible de quatre à six années de prison. Les trois autres responsables du groupe pétrolier au Pérou, comme « complices », selon le parquet.
Une fois de plus, cette catastrophe montre que le mode de production capitaliste épuise deux choses : les travailleurs, les travailleuses et la nature.