« Le gouvernement actuel est un gang de colons d’extrême droite », dénonce Layana, jeune communiste de Haïfa

publié le dans
« Le gouvernement actuel est un gang de colons d’extrême droite », dénonce Layana, jeune communiste de Haïfa

Layana Khoury est membre du Hadash et des Jeunes communistes israéliens. Depuis Haïfa, elle a accepté de répondre aux questions d’Avant Garde sur la situation politique d’Israël issue des dernières élections législatives. 

Le 1er novembre 2022, des élections législatives ont eu lieu en Israël, elles ont vu la victoire d’une coalition composée du Likoud et de divers autres partis d’extrême droite. 

Cet hiver, Benjamin Netanyahu, tout juste redevenu Premier ministre, a composé un gouvernement que beaucoup pensent être le « plus à droite de l’histoire d’Israël », est-ce vrai ? 

Le gouvernement actuel est un « gang de colons d’extrême droite », c’est le sixième gouvernement de Benjamin Netanyahu et le plus à droite. 

Netanyahu a tout fait pour redevenir Premier ministre. Ce gouvernement est composé de six partis : le Likoud, Shas, Judaïsme unifié de la Torah, le Parti sioniste religieux, Otzma Yehudit et Noam. Ces partis sont tous d’extrême droite, religieux, ils sont racistes, fascistes et favorables à la colonisation et de l’occupation. Certains d’entre eux ont clairement des idées que l’on pourrait qualifier de terroristes. 

Itamar Ben-Gvir, le nouveau ministre de la Sécurité intérieure, multiplie les provocations à l’encontre du peuple palestinien. Ont-elles contribué à l’augmentation des tensions entre Israël et la Palestine ?

Depuis sa nomination, Itamar Ben-Gvir montre au monde le vrai visage de l’occupation, le véritable visage des colons en Cisjordanie et il n’y a rien d’étonnant à cela puisqu’il est leur meilleur représentant. 

Ben-Gvir et ses soutiens vont bien sûr tenter d’accélérer le processus de colonisation, en légalisant des colonies, en faisant de celles-ci des avant-postes en Cisjordanie et en les entourant de zones militaires pour « défendre les colons ». En plus de cela il tente de faire voter des lois répressives telles que l’exécution des prisonniers. 

Il me semble néanmoins important de souligner que cette situation qui menace la paix entre les Palestiniens et les Israéliens n’est pas nouvelle, que nous la dénonçons depuis longtemps et que de fait Ben Gvir n’est pas la seule cause du « conflit » même s’il en est l’incarnation parfaite. 

Peux-tu nous expliquer les mesures que Ben-Gvir souhaite mettre en place ?

Ben-Gvir a commencé en se comportant comme un fasciste. Il a d’abord été nommé ministre de la « Sécurité nationale », un nouveau poste avec des pouvoirs sur la police, qui opère également dans le territoire occupé par Israël depuis 1967.

Son parti d’extrême droite Otzma Yehudit et Netanyahu sont parvenus à un accord sur les principes suivants : législation avancée pour soutenir les forces d’occupation, promouvoir « l’identité juive » et réformer le système judiciaire.

Ben-Gvir a insisté sur le fait qu’il voulait également expulser de la Knesset les députés arabes et d’extrême gauche, tels que Ayman Odeh, Ahmad Tibi et Ofer Cassif de la faction parlementaire Hadash-Ta’al.

Ben-Gvir cherche à approfondir la colonisation, l’oppression et le terrorisme des colons contre les Palestiniens et les prisonniers. En plus d’avoir adopté de nombreuses lois régressives et corrompues.

Comment expliques-tu la chute des partis arabes et des forces progressistes israéliennes lors des dernières élections législatives ? 

La publication des résultats des élections de novembre dernier a mis en relief la défaite des partis politiques anti-Netanyahu, car le décompte final a montré que seulement 30 293 voix séparaient les deux camps. Même si cet écart représente moins d’un siège à la Knesset, la nouvelle coalition de droite dispose d’une majorité décisive de quatre sièges. La liste commune Hadash-Ta’al a quant à elle remporté 5 sièges. 

Les huit partis de ce que l’on pourrait appeler le « bloc anti-Netanyahu » comprenant la coalition de la majorité sortante, Hadash-Ta’al et le parti arabe Balad ont atteint 2 330 454 voix, ce chiffre comprend les 288 789 suffrages exprimés par le parti sioniste de Gauche Meretz et le Balad qui n’ont pas franchi le seuil électoral. Le Meretz a en effet obtenu un total de 150 696 voix, soit 3,16 % des voix et n’était donc qu’à 4 124 voix d’entrer à la Knesset et d’avoir des élus.  

Les partis arabes se sont présentés sur 3 listes différentes : Hadash-Ta’al, Balad et le Ra’am (Liste arabe unie). Le Balad, qui s’était présenté sur une liste commune avec Hadash et Ta’al lors des cinq élections précédentes, s’est retiré d’un arrangement similaire une heure seulement avant la date limite de soumission des listes électorales des partis à la commission électorale centrale le 15 septembre. Il n’a finalement recueilli que 138 093 voix, soit environ 2,9 %. Ces 288 789 voix (celles du Meretz et du Balad) représentent plus de sept sièges à la Knesset dans un calcul brut du nombre de votes exprimés. 

Récemment, Benjamin Netanyahu a annoncé la « légalisation » de plusieurs colonies israéliennes en Cisjordanie. Peux-tu nous dire ce que cela signifie ?

Le cabinet de « sécurité » israélien a légalisé neuf avant-postes illégaux en Cisjordanie occupée et les a transformés en nouvelles colonies. Outre la légalisation des neuf avant-postes, le Cabinet a décidé de connecter des dizaines d’autres avant-postes illégaux aux infrastructures de l’État comme l’eau et l’électricité et d’approuver la planification et la construction de milliers de nouveaux logements dans les colonies.

Techniquement, cela signifie « réglementer les colonies en Cisjordanie et permettre à l’entité occupante de poursuivre la construction et le développement, confisquer des terres palestiniennes privées sur lesquelles des colonies ont été construites en Cisjordanie et les allouer aux colons israéliens ». En fait, le nom le plus évident pourrait être le « projet de loi sur l’expropriation » parce qu’il légalise la confiscation rétroactive par le gouvernement des terres appartenant aux Palestiniens.

Naturellement, Hadash voit que les colonies israéliennes sont des crimes de guerre. 

Construire de nouveaux avant-postes signifie voler plus de terres palestiniennes, aggraver le blocus et l’occupation qui conduit à serrer la vis aux Palestiniens et c’est le but principal de la légalisation de plus de colonies. 

Le gouvernement israélien ne croit pas au droit des Palestiniens à l’autodétermination. Il s’en fiche, mais transgresse le droit international, en continuant à construire des colonies, en protégeant les colons et en soutenant l’occupation terroriste.

Hadash estime que la seule voie vers la paix est l’autodétermination des Palestiniens et des Israéliens et l’établissement du pays palestinien aux frontières de 1967.

Benjamin Netanyahu ainsi que certains membres de son gouvernement sont soupçonnés ou ont même été condamnés pour des faits de corruption. Pourtant, cela ne les a pas empêchés d’être élus… Y a-t-il un mouvement anticorruption en Israël ? 

Oui, le samedi 4 mars, près d’un quart de millions de manifestants sont descendus dans les rues d’Israël, il s’agit du septième week-end consécutif de manifestations contre le gouvernement d’extrême droite, avant que les projets de loi sur la réforme judiciaire ne soient présentés à la plénière de la Knesset lundi. 

Les organisateurs du mouvement de protestation ont déclaré lundi « journée nationale de lutte », qui comprendra, pour la deuxième semaine consécutive, un grand rassemblement devant la Knesset, ainsi que des manifestations dans diverses villes et la fermeture de certaines entreprises.

En tant que militants communistes, comment luttez-vous contre le fait que la société israélienne semble se tourner de plus en plus vers l’extrême droite ? Quelle est votre stratégie ?

La stratégie est de renforcer le corps antifasciste, les mouvements de lutte contre l’occupation et la corruption.

Comme vous le voyez peut-être dans les médias, il y a chaque week-end d’énormes manifestations dans diverses parties d’Israël contre les amendements judiciaires, mais une grande partie des manifestants ne se soucie pas de la fin de l’occupation et de la société palestinienne ou de la paix. Ce qui préoccupe uniquement Israël, c’est la sécurité d’Israël et son image internationale. Nous voyons donc cette séquence politique comme une opportunité d’influencer ces gens et de faire entendre la voix de celles et ceux qui sont hostiles à l’occupation. 

Penses-tu que la communauté internationale peut influencer la façon de gouverner de Netanyahu ? Avez-vous des attentes vis-à-vis de la France et des Nations Unies ?

Bien sûr, je pense que la clémence internationale, le silence et le fait de fermer les yeux sur les crimes de guerre de Netanyahu et sa corruption au cours des dernières années ont conduit au gouvernement actuel et ont conduit à des émeutes.

J’attends de la communauté qu’elle ne se contente pas de « condamner » et qu’elle passe aux actes. 

Quels sont les espoirs des jeunes communistes israéliens aujourd’hui ?

Les espoirs des jeunes communistes n’ont pas changé depuis un moment, nous exigeons la fin de l’occupation, une paix durable, l’autodétermination du peuple et un avenir meilleur pour la jeunesse.


Édition hebdomadaire

Mêmes rubriques