Stéphane Courtois, brouilleur d’histoire, salisseur de mémoire

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Stéphane Courtois, brouilleur d’histoire, salisseur de mémoire

Dans une récente chronique-entretien pour le Figaro, Stéphane Courtois, anticommuniste reconnu et aux relents de plus en plus réactionnaires, a trouvé de bon goût de critiquer la panthéonisation du couple Manouchian en insultant leur souvenir.

On le connaissait piètre historien, on le savait mauvais théoricien, l’occasion nous est aujourd’hui donnée de le découvrir médiocre citoyen, attaquant jusqu’au mérite de héros morts pour la France.

Manouchian, “modeste résistant”

À peine entamé, l’article donne la nausée. Courtois y décrit Manouchian comme suit : “si sa mort précoce face à l’ennemi ne peut qu’émouvoir et susciter l’admiration, en réalité, Missak Manouchian fut un modeste résistant”. Cette nuance est un crachat sur le sacrifice suprême du résistant arménien. 

Mais c’est aussi une faute au regard de l’histoire. Commissaire militaire au sein des FTP-MOI, Manouchian a coordonné des actions de résistance effectuées par les étrangers, et notamment l’opération armée contre le colonel Julius Ritter. Sa mission a également consisté à ne jamais laisser les troupes d’occupation se sentir en sécurité à Paris.

Manouchian, “résistant sur consigne de Moscou”

La suite de l’article n’est pas davantage brillante. Dans une vision rabougrie du patriotisme, Courtois considère que “pour tout cadre communiste de cette époque, la vraie patrie était l’URSS”. Nouvelle nuance, nouveau crachat. Mais aussi démonstration d’une inculture crasse, pour les communistes : patriotisme et internationalisme vont de pair. En résistant contre l’occupation, Manouchian s’inscrivait à la fois dans un mouvement révolutionnaire mondial et dans un combat pour la France. 

C’est d’ailleurs pour cela qu’il s’engage dès 1940 en tant que volontaire dans l’armée française. Loin donc des fantasmes faisant de l’URSS la seule patrie des communistes et des insultes faisant d’un immigré un faux patriote.

Une “héroïsation construite par le PCF”

Derrière la panthéonisation du couple Manouchian, Courtois tient à voir une action de propagande du Parti communiste français. Oui, les communistes s’enorgueillissent de compter dans leurs rangs des braves qui ont versé leur sang pour que vive la France. Oui, les communistes ont œuvré à cette panthéonisation qui fait honneur à tous les immigrés, apatrides et juifs ayant résisté. Nous tenons à saluer ici le rôle qu’a tenu Pierre Ouzoulias dans ce travail de justice mémorielle. 

Pour autant, les communistes n’ont été ni les premiers, ni les plus actifs pour hisser le groupe Manouchian au statut de héros nationaux : ce sont les nazis et collaborateurs, en les fusillant et en diffusant l’affiche rouge, un des éléments de propagande les plus célèbres de cette sombre époque.

La vérité de la résistance ne plaît pas à Courtois

Avec cet entretien, Stéphane Courtois apporte la démonstration qu’il n’aime pas l’histoire. En s’attaquant à la figure de Missak Manouchian, il se livre à une attaque contre tous les communistes, et contre tous les résistants issus de l’immigration, sans papiers, morts pour la France. 

Fervent anticommuniste, dénoncé à de multiples reprises pour son manque de déontologie historique pour construire un récit réactionnaire, il y a peu de doute quant au camp qu’aurait choisi Courtois à cette époque. Qu’il soit réactionnaire et anticommuniste, c’est son droit en république. Qu’il fasse la démonstration quotidienne de son inculture et de sa démagogie nauséabonde, c’est également son droit. Mais que le Figaro lui accorde une tribune pour souiller la mémoire de la résistance et se donner à un exercice, au fond, antipatriotique et – pour le moins – révisionniste pose question, à quelques heures d’un hommage national.


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