Suspension du RSA : la droite des départements n’a pas froid aux yeux

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Suspension du RSA : la droite des départements n’a pas froid aux yeux

Suite à l’annonce tonitruante du gouvernement Barnier de la coupe budgétaire de 5 milliards pour les collectivités locales, dont 2.4 milliards pour les départements, Nicolas Lacroix, nous annonce dans le plus grand des calmes, la proposition miracle : arrêter les versements à la CAF en vue de la suspension du RSA et la prise en charge des mineurs non accompagnés.

Selon lui, les politiques migratoires relèvent de la compétence de l’État. Il dit, ne plus être en capacité de « prendre en charge les nouveaux mineurs accompagnés, car c’est de la politique migratoire […], la protection de l’enfance, ce n’est pas la politique migratoire ». La droite s’attaque une nouvelle fois à ces enfants : elle essentialise ces mineurs réduit au statut de « migrants » et les prive ainsi de la protection dont ils bénéficient de droit : la protection de l’enfance. Ceci n’est pas une annonce isolée, elle est belle et bien portée par l’ensemble des départements de droite et du centre comme le confirme François Sauvadet (président de l’assemblée des départements de France). Bien qu’obligé de reconnaitre que ce sont les allocataires qui vont pâtir de l’arrêt du versement à la Caf, M.Sauvadet affirme que ce n’est ni une menace ni une forme de rébellion contre le gouvernement mais « un constat ». En effet, pour la droite, cette amicale du capital, l’enjeu de la suppression du RSA cache bel et bien une escroquerie déloyale.

Le RSA c’est quoi ?

Pour comprendre le Revenu de solidarité activité, ce revenu géré par les conseils départementaux, il faut remonter à la création de son ancêtre, le RMI (Revenu minimum d’insertion). Ce dernier a été créé en 1989 alors que la France était frappée de plein fouet par un chômage de masse. Le but : accorder un soutien illimité dans le temps aux ménages à bas revenus. Considéré comme incitant à l’oisiveté, il a été transformé en RSA pour pousser les allocataires à l’emploi et implanter des conditions à son obtention. Or, de nombreuses études, dont l’INSEE montrent que cette idée n’a aucun fondement.

Le RSA est de 607.75 euros mensuel pour une personne seule, sans activité, sans autre revenu et sans aide au logement, il est particulièrement bas, face  notamment à la situation à l’inflation qui étouffe les ménages ou encore l’augmentation débridée des prix du logement … et certains statuts n’y ont pas droit comme les doctorants alors, considérés comme étudiants qu’ils n’ont plus accès aux bourses, et qu’ils ne sont pas assurés d’obtenir un contrat doctoral auprès la fac.

Pour rappel, aujourd’hui un jeune sur deux de moins de 30 ans vit chez ses parents ce qui implique des difficultés d’accès aux lieux d’emplois. Et si 1.85 millions de ménages touchent le RSA en France, cela risque d’augmenter …

Pas de RSA, ni d’emplois : la double peine

Aujourd’hui, le RSA peut être obtenu à partir de 25 ans sans ressources et seuls les actifs de 18 à 24 ans ayant travaillé au moins 2 ans à temps plein au cours des 3 dernières années, ou célibataire avec un enfant à charge, y ont droit. Or, pour rappel, l’âge moyen du premier emploi stable et de 27 ans. Et c’est bien la jeunesse qui est touchée par le chômage (17.2% au lieu de 7% pour les autres tranches d’âge).

De plus, cette proposition de la suspension du RSA se fait au lendemain de l’annonce de la fermeture de sites d’entreprises phares du paysage industriel et commercial français : Michelin et Auchan. Ce sont près de 4000 emplois supplémentaires qui vont disparaître.

Cette actualité illustre bien un double échec : Le bilan budgétaire de l’Etat qui prouve l’échec du manque d’investissement dans nos structures au profit des actionnaires, des services publics privatisés, fragmentés. De plus, la droite se targue de lutter contre l’oisiveté mais ils ne nous protègent pas du sans-emploi en n’agissant pas pour endiguer l’hémorragie de désindustrialisation ou en supprimant des postes dans le public.

Mais tout ceci n’est pas sans intérêt. Ne pas s’assurer du maintien et de la création d’emplois tout supprimant le RSA, c’est mettre le couteau sous la gorge des travailleurs qui vont accepter plus allègrement des contrats précaires (Interim, CDD) pour  des salaires revus à la baisse. Cela sert bien le capital qui se nourrit de cette variable d’ajustement ; de cette main d’œuvre désespérée prête à l’emploi selon les besoins du capital.

C’est en réalité une menace pour l’ensemble des travailleurs car il y a un risque de Dumping social à l’intérieur même de notre pays : comment revendiquer de meilleures conditions de travail et des salaires décents si une masse désespérée est prête à accepter à la place des plus réticentes ?

Si le droit à des moyens convenables d’existence est inscrit depuis 1946 dans la Constitution, le RSA n’est pas une solution qui devrait être envisagé sur le long terme. Cette mesure est bien une réponse à une crise de la privation d’emploi. Or, à l’heure où aucune mesure de création d’emplois ne se profile, alors que le droit à un emploi est inscrit dans la constitution, cette menace de la suspension du RSA est un nouveau coup porté à la population qui doit assumer les magouilles des capitalistes et du gouvernement. Selon le préambule de la constitution française : « chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi ». Il ne faut donc pas voir le RSA, ou encore l’Assurance chômage comme une aumône vertueuse mais bien comme un dédommagement d’un préjudice subit.


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