Réforme du bac professionnel : les inquiétudes se confirment

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Réforme du bac professionnel : les inquiétudes se confirment

Après des premières annonces sur la gratification des stages à la fin de l’été, le ministère de l’Éducation nationale a dévoilé récemment aux syndicats son projet de réorganisation de l’année de terminale du lycée professionnel. Un calendrier qui annonce de nouvelles heures de cours en moins pour les élèves et un abandon de toute ambition pédagogique derrière les stages.

Calendrier du bac : retour à la case départ

On pensait que Gabriel Attal avait compris. À la rentrée, le Ministre et le Président annonçaient une réorganisation du calendrier du baccalauréat général afin d’en finir avec les épreuves de spécialités au mois de mars.

Il accédait ainsi aux revendications des professeurs et des élèves qui dénonçaient une fin d’année vidée de son sens en raison de ces épreuves anticipées. Mais, visiblement, ce qui est bon pour les élèves de lycée général ne l’est pas pour ceux de l’enseignement professionnel. En effet, le gouvernement prévoit de faire passer dès le mois de mars certaines épreuves générales aux élèves, parmi lesquelles le français, l’histoire ou encore la gestion.

Concrètement, les enseignements de ces disciplines prendront donc fin dès cette période. Une manière de réduire encore la place de ceux-ci dans un cursus qui a déjà subi de nombreuses coupes horaires. Une fois ces épreuves passées, les élèves enchaîneront 6 semaines de stages consécutives, puis reviendront au mois de mai passer leurs épreuves de matières professionnelles. La fin de l’année sera ensuite soit consacrée à des stages, soit à des enseignements, puis les élèves se rendront une dernière fois dans leur établissement au mois de juillet pour des dernières épreuves du baccalauréat.

 Ainsi, l’année scolaire prendra fin au mois de mars pour laisser place à des allers-retours entre stages et examens, sans aucun lien ni travail avec leurs enseignants. Pour le SNUEP-FSU, « le ministère organise ici clairement le décrochage scolaire et la baisse de la réussite aux examens » et dénonce : « Qui peut croire qu’après 3 mois et demi en dehors de l’école, nos élèves vont revenir docilement début juillet passer des épreuves ? ».

Des stages sans aucune conception pédagogique

Le nouveau calendrier propose ainsi de regrouper tous les stages de l’année de terminale au même moment. Une décision qui remet en question la liberté laissée aux enseignants et aux établissements d’organiser ceux-ci de manière autonome.

Alors que la formation professionnelle repose – théoriquement — sur des allers-retours entre apprentissages en classe et application sur le terrain via des stages, le calendrier du gouvernement sépare de manière nette ces deux éléments de la formation des élèves.  De fait, les élèves seront plongés pendant six semaines d’affilée dans un environnement de travail, sous le contrôle d’un patron, ne permettant pas ce lien entre apprentissage et terrain.

En plus de ces 6 semaines, les élèves qui le souhaitent pourront en effectuer 6 autres entre mai et juin, faisant ainsi passer le nombre de semaines de stages de 8 à 12 au total. Alors que les syndicats avaient réussi à éviter une hausse du volume horaire de stage global, le gouvernement impose ici quatre semaines supplémentaires, qui se feront donc au détriment d’heures d’enseignements, confirmant ainsi la vision patronale du gouvernement de la formation professionnelle.

Une fin d’année à la carte

En laissant les élèves « choisir » entre des stages en fin d’année ou une « préparation à la poursuite d’étude », le nouveau calendrier organise aussi un tri au sein des élèves de terminales. Celles et ceux se destinant à une insertion professionnelle rapide, ou en plus grande difficulté scolaire, iront faire des stages, désormais rémunérés, tandis que les autres qui souhaitent continuer les études pourront continuer à recevoir des enseignements sans que leur contenu ne soit encore dévoilé. Une manière de spécialiser toujours plus tôt les élèves et d’en finir avec l’ambition d’une culture commune offerte à tous les élèves. 

Car c’est bien finalement là que réside le cœur du nouveau calendrier du baccalauréat : réduire la place du tronc commun dans l’année de terminale pour orienter toujours plus tôt les élèves vers la mise au travail. L’année scolaire prendra donc fin dès le mois de mars, renvoyant ensuite chaque élève face à ses « choix » qui risquent fortement d’être guidés non pas par des aspirations réelles, mais par des nécessités économiques ou des contraintes en termes de réussite scolaire.

Face à ces annonces, l’intersyndicale regroupant la FSU, la CGT, FO, la CNT, SUD et le SNALC a annoncé qu’elle « prendrait ses responsabilités » pour « stopper ce démantèlement » des lycées professionnels. La dernière fois, elle avait su faire plier le gouvernement.

 

 


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