L’élection présidentielle américaine focalise comme toujours l’attention du monde entier. Une différence toutefois, dans l’intensité de la campagne où la confrontation entre anti et pro Trump est arrivée à un niveau de violences et de tensions jamais atteint depuis des décennies aux Etats-unis.
Année après année, Donald Trump aura tout fait pour manipuler l’opinion s’inscrivant de plus en plus dans une politique d’extrême droite afin de masquer les enjeux sociaux pour la population américaine. En face, le candidat démocrate Joe Biden peine à incarner une alternative convaincante et fait figure de moindre mal pour bon nombre d’électeurs.
Mais durant cette année 2020, la campagne a été jalonnée d’événements dramatiques qui ont fait ressurgir au sein de la campagne des sujets centraux : lutte contre le racisme, catastrophes écologiques majeures et santé publique avec le covid-19. Comment ces événements ont marqué la campagne présidentielle, qui s’achève le 3 novembre ?
Le système de santé américain face au COVID
Dans un pays où la réforme du système de santé est au cœur des débats, sa mise à l’épreuve durant la pandémie a agité la campagne. Alors que Donald Trump n’a eu de cesse de réfuter les dangers du coronavirus, il a lui aussi finit par être hospitalisé après avoir contracté le virus. D’après le New York Times, la thérapie à laquelle a pu avoir accès le milliardaire a coûté 100 000 $.
Aux Etats-Unis, il n’y a pas d’assurance maladie pour 27 millions d’américains et la crise économique qui est venue s’ajouter à la crise sanitaire n’a fait qu’aggraver la situation : des millions d’américains vont se retrouver privés d’emplois et donc d’assurance maladie. En effet, comme partout ailleurs dans le monde, la pandémie a mis en exergue, voir accentué les inégalités sociales : les taux de mortalités enregistrés dans les quartiers pauvres se sont révélés 3 à 5 fois plus élevés que dans les quartiers aisés selon les chiffres officiels.
Une mise à l’épreuve du modèle libéral qui a démontré ses faiblesses à satisfaire des besoins de santé primordiaux, alors que le compteur de victimes du coronavirus s’envole. Le sujet majeur de la réforme de l’Obamacare s’invite dans le débat. Cette mesure initiée par le président Obama, qui avait pour but d’améliorer l’accès aux soins pour les plus démunis : tandis que Biden promet un élargissement de l’accès au soin, Donald Trump promet au contraire la suppression pure et simple de l’Obamacare, réforme jugée « socialiste ».
Assassinat de George Floyd et mobilisation historique à travers les États-Unis
Le 25 mai dernier, l’assassinat de George Floyd et la diffusion de la vidéo des faits, reste l’évènement tragique qui aura le plus marqué la campagne présidentielle américaine, par son retentissement tout au long de l’année 2020. De nombreuses manifestations anti-racistes ont été organisées à travers le pays mais également des émeutes, sous le slogan de Black Lives Matter ou encore Let us Breath. Dès les premières instants, Joe Biden s’était montré solidaire du mouvement Black Lives Mater en allant voir les familles des victimes et en s’associant aux manifestations.
D’autres faits divers ont alimenté la protestation contre le racisme institutionnel qui sévit aux USA, en particulier la diffusion d’une vidéo où l’on voit Jacob Blake se faire cribler de balles le dos par un policier.
Dernière exaction en date, lundi dernier, un jeune afro-américain souffrant de troubles bipolaire a été abattu par la police ce qui a provoqué plusieurs émeutes à Philadelphie. De son côté, Donald Trump a eu pour seule réponse un tweet cinglant : “Law and Order” et des accusations complotistes envers des manifestants qui seraient “contre les USA”.
Cette accumulation de violences policières n’a rendu que plus prégnante la tension durant la campagne entre milices pro-Trump et manifestants anti-Trump. Allant jusqu’à des faces à face armés, comme lors de la fusillade de Portland qui a provoqué la mort d’un militant anti-fasciste lors d’une manifestation ayant mal tournée.
Incendies en Californie : la question climatique dans la campagne
Thème souvent discuté lors du mandat de Trump, de par la hauteur de vue de ses déclarations sur le sujet, niant le consensus scientifique et accusant de fake news les alertes quant au dérèglement climatique, le sujet s’est lui aussi imposé par les faits. Cet été, des incendies géants frappaient les forêts américaines de la côte Est et provoquaient un lourd bilan : 27 morts et plus de 2 millions d’hectares dévastés. Les photos aux allures apocalyptiques du ciel de Californie, teinté d’orange, tournaient sur les réseaux sociaux et des records mondiaux de pollutions étaient observés dans la zone.
Forcé de réagir, le Président Trump avait rapidement détourné le sujet en s’en prenant aux élus californien, les accusant de mauvaise gestion forestière. Les démocrates ont dénoncé le mensonge et pointé les conséquences du réchauffement climatique, qui provoque régulièrement ces feux gigantesques en Californie.
Le sujet de l’écologie est désormais un incontournable, même aux Etats-Unis où d’ordinaire il préoccupe moins l’opinion américaine. Une étude démontre que 25% des électeurs orientent leur vote en fonction du programme sur le changement climatique. C’est pourquoi Joe Biden veut faire de l’écologie un pilier de sa campagne. Mais son programme reste encore timide sur le sujet et se donne des moyens qui ne sont pas à la hauteur des ambitions, notamment un objectif de neutralité carbone en 2050, via des investissements dans des nouvelles technologies moins polluantes et un retour dans l’Accord de Paris. Face à un Donald Trump agressif, qui joue sur la peur des pertes d’emplois que causeraient selon lui les politiques écologiques, son rival devra se montrer d’autant plus convaincant sur le sujet et ne pas rentrer dans le jeu et le discours de l’écologie punitive.
Des craintes après le scrutin
Dans un pays en état de tension sociale extrême pour lequel certains observateurs et politiques parlent de menace de guerre civile, le résultat de l’élection sera quoi qu’il arrive un choc dans la vie politique. De plus, Donald Trump aux abois est prêt à jouer toutes les cartes possibles pour se maintenir au pouvoir. Il dispose de véritables milices à son service, comme le mouvement Qanon, adeptes de théories complotistes avec une grande puissance de propagation. Pour une grande partie de ses partisans, une défaite de Trump serait forcément le résultat d’un trucage électoral, comme le Président Trump le déclarait lui-même. Il aura notamment orchestré une polémique sur le vote par correspondance durant la campagne, arguant d’une incapacité des services postaux à pouvoir gérer le scrutin.
Pour le moment, les autorités enregistrent une grande participation, ce qui va rallonger le processus et donc l’attente des résultats. A cette attente des résultat, la force de l’enjeu fait également redouter que se reproduise ce qu’il s’était passé en 2000 lors des élections présidentielle où George W. Bush et Al Gore s’affrontaient : il avait fallu attendre plus d’un mois pour que le résultat tombe enfin, suite à une décision de la Cour Suprême.