Harcèlement moral institutionnalisé confirmé au procès France Télécom 

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Harcèlement moral institutionnalisé confirmé au procès France Télécom 

Le 21 janvier, la chambre criminelle de la Cour de cassation a prononcé le verdict définitif du procès France Télécom pour “harcèlement moral institutionnalisé”. Elle confirme en cela la décision du tribunal correctionnel et de la cour d’appel. 

Le 30 septembre 2022, Didier Lombard, ex-PDG de France Télécom, Olivier Barberot, ex-DRH, Louis-Pierre Wenès, ex-directeur exécutif délégué ainsi que France Télécom devenu Orange, se sont pourvus en cassation pour invalider leurs condamnations pour “harcèlement moral institutionnalisé”. L’Avant-garde avait déjà traité du fond de l’affaire dans un article.

À quoi sert la Cour de cassation ?

Le rôle de la Cour de cassation n’est pas de juger des faits, mais de la conformité du jugement prononcé au regard du droit. Nous sommes ici en droit pénal, où l’interprétation est stricte. La Cour devait ainsi se prononcer sur la conformité du délit de harcèlement moral institutionnalisé au regard du délit préexistant de harcèlement moral. Ultime recours pour espérer être blanchi, sa décision est définitive.

Quelles conséquences pour le droit des salariés ?

En entérinant définitivement la condamnation en appel pour harcèlement moral institutionnalisé, la Cour de cassation confirme la jurisprudence adoptée par la Cour d’appel. Il est désormais possible de porter plainte pour harcèlement moral institutionnalisé si une entreprise définit sciemment une politique visant à systématiser le mal-être psychologique de ses salariés en les poussant à bout. Pour rappel, ce sont 19 salariés qui ont mis fin à leurs jours, 12 autres qui ont tenté de le faire et 8 salariés qui ont dû bénéficier d’arrêts de travail en raison de dépressions. Cette décision de la Cour les reconnaît donc comme les victimes d’une politique jusqu’au-boutiste dans son inhumanité managériale.

L’affaire France Télécom ne sort pas de nulle part. Elle est la réalité derrière les discours managériaux. C’est la violence du rapport de classe masquée par le terme de “collaborateur” qui tend à faire croire que patron et salariés sont égaux. C’est l’aspect réifiant de la “ressource humaine” où le salarié n’est qu’un outil de la production. Si les Lombard, Barberot et Wenès se croyaient dans leur bon droit en poussant à bout leurs salariés pour qu’ils partent “par la fenêtre ou par la porte”, selon les termes de Lombard lui-même, c’est parce que la logique même du travail en régime capitaliste est déshumanisante. Charge à nous de gagner le travail émancipateur et rémunérateur pour toutes et tous.


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