Dans l’ombre des Jeux Olympiques, les travailleurs du village

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Dans l’ombre des Jeux Olympiques, les travailleurs du village

Si les Jeux olympiques Paris 2024 ont été une réussite, c’est grande partie grâce aux travailleurs “invisibles”, indispensables au bon fonctionnement des jeux. Le village olympique, situé à cheval sur les communes de Saint-Denis, Saint-Ouen et l’île Saint-Denis, a hébergé plus de 14 000 personnes sur la période olympique et un peu plus de 9 000 pour la période paralympique. 

40 000 repas ont été servis chaque jour pour les athlètes, leur staff, les bénévoles, les travailleurs, etc.

Mépris de classe et des conditions de travail 

Les travailleurs et bénévoles du village ont fait face à des conditions de travail loin d’être optimales malgré le travail fait par les syndicats, les engagements pris, etc. Le village ayant été livré à la dernière minute, de nombreux problèmes de ventilation ont eu lieu, des températures avoisinant les 40° ont été relevées dans plusieurs lieux lors des journées les plus chaudes. 

L’absence de points d’eau à proximité des lieux de travail, de salle des repos, de douche, de vestiaires (un des vestiaires des femmes a été réquisitionné par des hommes pour en faire une salle de prière, leur interdisant l’accès à la pièce, les obligeant ainsi à se changer dans les toilettes) a été dénoncée à maintes reprises sans que le moindre changement soit opéré.

Le manque de lieux pour se protéger du soleil et d’accès à l’eau ont mis en danger de nombreux salariés, particulièrement chez les agents de sécurité et bénévoles qui géraient la circulation.  

L’inspection du travail mène actuellement une enquête sur les contrats « forfait jour » des salariés de Paris2024 ; amplitude horaire de plus de 10 h, pas de journée de repos, des heures supplémentaires non payées ont été relevées.  

Plusieurs grands groupes, présents sur le village, ont choisi comme mode de fonctionnement le rassemblement selon le pays d’origine ou la langue maitrisée afin d’obtenir une communication plus simple. Ainsi, les travailleurs étaient regroupés selon leur origine et les groupes étaient nommés selon le pays. Les travailleurs sénégalais s’occupaient de certains bâtiments, les Maliens d’un autre, les Marocains encore d’un autre. Les équipes encadrantes sur le terrain devaient nécessairement parler la langue commune à leurs travailleurs. Si des blagues racistes basées sur les stéréotypes du pays ont été entendues et dénoncées, les travailleurs victimes de ces propos n’ont pas pu se défendre face à leurs employeurs. 

Alors même que des clauses ont été signées pour travailler à l’insertion pérenne sur le marché du travail à l’issue des jeux, on se pose la question de quelle insertion peut-on offrir à un travailleur qui n’a pas la possibilité de rencontrer d’autres travailleurs, ni d’apprendre la langue du pays dans lequel il vit et travaille. 

L’absence de débouchés 

La formation « CQP Agent de sécurité événementiel » créée spécialement pour les JO dont le CROUS et France Travail ont fait la publicité — avec la promesse d’une prime de 600 € à la clé — n’offre actuellement aucun débouché et n’ouvre pas droit aux primes mises en avant par France Travail, puisque celle-ci est conditionnée à 600 h de travail sur un poste d’Agent de sécurité événementiel qui n’existe pas dans le monde du travail.

Le CQP Agent de sécurité événementiel est un mélange entre l’agent d’accueil classique et l’agent de sécurité, les formations en moins et la pénibilité des deux emplois cumulés (position debout prolongée, port d’EPI, travail en extérieur, horaires décalés…).

Les travailleurs de la restauration ont pour certains bénéficié lors de demi-journées ou de journées des bases de la formation HACCP indispensable pour travailler en restauration collective, mais sans bénéficier de la formation complète, et donc du diplôme attestant de leurs compétences, que les employeurs demandent. 

Ces travailleurs, souvent jeunes, en situation précaire, souvent immigrée, se sont retrouvés à la fermeture du village olympique, sans emploi et sans débouchés assurés, faute de qualification certifiée par un diplôme, prolongeant leur situation précaire.


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