Les sportifs russes et biélorusses pourront-ils participer aux Jeux olympiques de Paris ? Chez les fédérations sportives internationales, le débat enfle. Alors, faut-il bannir des joueurs et des pays ?
Le sport est politique. Le projet même de l’olympisme est politique : « contribuer à bâtir un monde pacifique et meilleur en éduquant la jeunesse par le moyen du sport pratiqué sans discrimination d’aucune sorte et dans l’esprit olympique qui exige la compréhension mutuelle, l’esprit d’amitié, la solidarité et le fair-play. »
Les appels à ne pas politiser le sport sont tout à fait illusoires et vains.
Si le sport est politique, cela tient en partie à la médiatisation du sport, à la mobilisation des supporters et aux valeurs véhiculées par le mouvement sportif.
Entre des pays souvent rivaux, concurrents, le sport est souvent l’un des derniers terrains d’entente, de paix et de coopération. Certains pays, qui ont rompu leurs relations diplomatiques, concourent ensemble dans les compétitions internationales, à l’image des deux Corées. Dans le sport s’affirme aussi l’appartenance à une humanité commune.
C’est parce que le sport permet un affrontement pacifique que la France peut envisager d’obtenir une « trêve olympique » l’été prochain.
Voilà 8 ans que le Comité olympique international a exclu la fédération russe de ses compétitions. Il était question en 2015, par cette sanction, de lutter contre le dopage dans les sports.
Aujourd’hui, la Russie est condamnée par la communauté internationale pour sa guerre d’agression contre l’Ukraine. La résolution de l’ONU du 23 février exige le retrait des forces militaires russes du territoire ukrainien. C’est à ce titre que des pays demandent l’exclusion des athlètes russes et biélorusses.
Est-ce un moyen d’obtenir la paix ?
Plusieurs moyens sont utilisés pour chercher la paix : certains pays comme le Brésil ou la Chine privilégient la diplomatie, d’autres soutiennent militairement l’Ukraine ou sanctionnent économiquement la Russie.
Quoi qu’on pense des moyens d’obtenir la paix (nous croyons pour notre part bien plus à l’action diplomatique qu’aux armes), on peut tous douter que bannir des athlètes d’une compétition sportive fasse avancer la paix d’un pouce.
Est-ce que ça ne contribuerait même pas au contraire à retarder la paix ?
À l’heure où les initiatives diplomatiques reprennent un peu le dessus, exclure les Russes de l’olympisme, c’est prendre le risque de rompre tout dialogue.
C’est d’ailleurs paradoxal lorsque la Russie participe toujours aux institutions des Nations unies. Nous n’allons pas exclure la Russie de l’humanité.
Les partisans de l’exclusion des athlètes russes craignent que la Russie profite des Jeux pour nourrir sa propagande. C’est une crainte légitime, mais des outils sont déjà parfaitement mobilisables contre ce type d’actions : bannière neutre, sanctions s’il y a des provocations…
Le Comité olympique s’est déclaré solidaire du peuple ukrainien et s’est joint aux appels à la paix. Voilà une déclaration forte qui ne peut que prendre de l’ampleur lors des Jeux.
Une coupe du monde s’est tenue il y a peu au Qatar, pourtant responsable d’atteintes aux droits humains. Nombreuses étaient les associations et les personnalités à ne pas boycotter la compétition, tout en dénonçant le choix du lieu, au motif qu’elle permettait la médiatisation des crimes du Qatar et de faire pression pour obtenir des changements.
Pourquoi la présence des athlètes russes et biélorusses empêcherait-elle une telle médiatisation des conséquences de la guerre et des voies de paix ?
Plusieurs fédérations sportives ont déjà fait le choix d’intégrer ces athlètes sous bannière neutre, comme celle d’athlétisme ou d’escrime. Ces Jeux sont organisés par le mouvement olympique, alors laissons-le décider et respectons ses valeurs car il saura les défendre.