Nucléaire militaire : la paix impossible

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L’agression de la Russie contre l’Ukraine montre à quel point l’existence des armes nucléaires n’empêche pas les guerres. Les puissances nucléaires, en usant de cette menace, de la doctrine de l’équilibre de la terreur, s’affranchissent du droit international. 

Les armes nucléaires ne sont ni garantes de la sécurité mondiale ni protectrices de l’humanité. Elles ont des conséquences humaines irrémédiables et représentent un danger pour le climat, la production alimentaire, le développement social et économique des pays. Elles peuvent entraîner des conséquences désastreuses sur plusieurs générations. 

À ce jour, la Russie et les États-Unis possèdent près de 90 % de l’arsenal militaire mondial. Le reste est partagé avec la France, la Chine, le Royaume-Uni, Israël, l’Inde, le Pakistan et la Corée du Nord. 

La perspective de la paix s’éloigne de plus en plus avec la relance de la course aux armements et la prolifération des armes nucléaires entraînée par la sortie des États-Unis de multiples traités. 

Le chemin de la paix est barré lorsqu’il y a simultanément une amélioration constante des capacités technologiques militaires, un regain des tensions encouragées par les dirigeants des puissances nucléaires, une remise en cause permanente du multilatéralisme. 

Comme puissance nucléaire, la France pourrait être à l’initiative sur le plan international d’un processus de sortie des armes nucléaires. La première étape pour ça est d’une part de ratifier le traité d’interdiction des armes nucléaires (TIAN) et de geler la modernisation des armes nucléaires. 

Se positionner pour l’interdiction des armes nucléaires, c’est se positionner pour le renforcement de la sécurité internationale et libérer le monde des armes nucléaires et de leur menace. 

Le TIAN est un instrument juridique contraignant pour les États, un levier pour rendre hors-la-loi la possession du nucléaire militaire. Il est essentiel de créer les conditions concrètes et solides à la sécurité humaine et collective à laquelle tous les peuples aspirent. 


En chiffres

76 % des Français sont favorables au désarmement nucléaire 

68 % d’entre eux sont favorables à la ratification du traité par la France 


Définition

TIAN : Traité d’interdiction des armes nucléaires 

Ratifié par les Nations Unies en 2017, le Traité d’interdiction des armes nucléaires est entré en vigueur le 22 janvier 2021. Il vise à interdire les armes nucléaires dans le monde, c’est-à-dire la production, l’utilisation ou la menace d’utilisation des armes nucléaires. Ce traité renforce l’article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. Il ne s’applique aujourd’hui qu’aux États signataires, sa valeur est donc d’ordre symbolique étant donné qu’aucune des puissances nucléaires, dont la France, ne l’a ratifié. 


Paradoxe

Antinucléaires et… pro nucléaires ? 

Interrogé en mars 2022 sur une éventuelle attaque de la Russie contre la France, Jean-Luc Mélenchon déclarait : « La réplique militaire sera cruelle ! » Question du journaliste : « Et nucléaire » ? Réponse : « La réplique sera ce qu’elle doit être ». 

L’échange avait alors surpris. À demi-mot, le leader de la France insoumise venait d’envisager — ou du moins refusait de rejeter — le recours à l’arme atomique en cas d’attaque. 

Cette timidité sur le nucléaire militaire contraste fortement avec la radicalité des propos sur le nucléaire civil de la France insoumise, qui fixe comme objectif une sortie totale de l’énergie atomique.

D’ailleurs, si le programme du candidat développait largement la fin du nucléaire civil, le nucléaire militaire n’était mentionné dans aucune de ses 158 pages. 

Il faut aller dans les livrets thématiques pour en entendre parler, toujours timidement. Le livret « Paix » se contente de proposer la « relance des processus multilatéraux de désarmement nucléaire » sans en faire une priorité, ou de faire de la France un « membre observateur » du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires. Pire, le livret « Défense » affirme que la dissuasion nucléaire « vise à protéger les intérêts vitaux de la nation », sans remettre en question son existence. 

Résumons : les centrales nucléaires, c’est non, les armes nucléaires, ça se discute. 


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